Test – Bandida

En 2016, un éditeur helvète répondant au mystérieux nom… d’Helvetiq, sortait un jeu étonnant dans une boîte au format inédit : Bandido. Ce jeu coopératif proposait alors un pitch détonnant : empêcher un prisonnier de s’échapper en fermant toutes ses voies de fuite possibles dans un dédale de tunnels.

Bandido fut un gros succès et donna naissance à une large gamme de jeux de cartes au format identique, parmi lesquels les très remarqués Forest, Misty, Papageno ou l’indispensable Kariba.

Si la collection connaît de nombreuses pépites, le succès de Bandido fut tel que nous ne pouvions entre nous nous empêcher de parler de ces jeux sous le nom de « format Bandido », ce qui veut un peu tout dire. L’annonce de la sortie de Bandida c’est-à-dire d’une suite pour Bandido fut donc une véritable surprise pour nous, et nous étions chauds bouillants à l’idée de voir comment l’éditeur avait pu développer le gameplay.

Dès que nous l’avons reçu, nous nous sommes donc jetés sur ce jeu, et nous l’avons énormément joué avant de rendre notre verdict. Oui, beaucoup plus que d’autres titres. Pourquoi ? Parce qu’au terme des premières parties, nous étions un peu déçus, pour ne rien vous cacher. Et parce que nous ne voulions pas avoir la sensation d’être passés à côté de quelque chose. Alors nous nous sommes acharnés, et nous allons de ce pas vous expliquer ce qui est arrivé…

Bandida est un jeu de Martin Nedergaard Andersen, illustré par Odile Sageat. Vous pouvez y jouer de 1 à 4 joueurs, à partir de 6 ans.

Bandido ?

Avant de nous lancer dans le test de Bandida, je table sur le fait que vous connaissez son sulfureux compagnon de cellule, Bandido. Si ce n’est pas le cas, je vous invite à consulter le prodigieux test que vous trouverez en suivant ce lien.

Vous voilà revenus ? Parfait !

Comme c’était le cas pour Bandido, Bandida est un jeu de cartes coopératif dans lequel vous devez bloquer la fuite d’un fugitif. Ou plutôt d’une fugitive. Eh oui : Bandida est elle aussi enfermée dans une prison de laquelle s’échappent 5 ou 6 tunnels, en fonction du niveau de difficulté choisi. Si les ressemblances avec Bandido sont évidemment évidentes, Bandida permet, toutefois, de choisir l’objectif à accomplir : attraper Bandida, sauver Bandida, ou sauver Bandida ET Bandido, pour peu que vous ayez les deux jeux à dispo. 3 modes de jeu, donc, pour des parties plus variées que celles de Bandido, ce qui est toujours une bonne nouvelle.

Ay ay Bandida !

Dans le premier mode de jeu, très proche de celui de Bandido, le but du jeu est de capturer Bandida en fermant tous les tunnels qui lui permettraient de s’échapper.

Chaque joueur débute la partie avec une main de trois cartes et en pose une une fois son tour venu… Toutes les cartes du jeu représentent des tronçons de couloirs, offrant souvent de nouvelles intersections, c’est-à-dire autant de voies de sorties possibles pour la terrible Bandida. Certaines cartes présentent néanmoins des culs-de-sac, essentiels pour bloquer la fugitive. Chaque carte jouée est immédiatement remplacée par une nouvelle carte prise dans la pioche et le joueur suivant pose une carte à son tour. On procède de la sorte jusqu’à ce que Bandida soit coincée ou que la pioche soit épuisée (ce qui est le cas le plus probable).

Et là vous me dites : « oui mais je ne vois pas de différence avec Bandido ». Et je vous répondrai que vous avez raison, mais que vous arrivez à point nommé pour m’autoriser une bouleversante transition. Et je vous en remercie, donc.

Les nouveautés de Bandida ! Ayayayay !

La principale différence entre Bandida et Bandido, ce sont les objets. Comprenez par là que certaines cartes de Bandida permettent de déclencher des effets aussitôt qu’elles sont jouées. Parfois les objets seront bien pratiques, parfois ils vous pourriront la vie. Il vous arrivera même qu’un objet innocent vienne vous tirer une balle dans le pied alors que la victoire semblait à portée.

Parmi les objets présents sur les cartes, vous pourrez par exemple trouver des sacs à dos (augmentant la capacité de votre main d’une carte), des plans (qui vous permettent de supprimer des cartes déjà posées), voire de la dynamite (qui vous permet de jouer deux cartes d’affilée).

Si les cartes peuvent vous aider, certaines ont des effets volontairement négatifs pour vous pourrir la vie. Pourquoi les jouer, alors ? Peut-être parce qu’elles vous permettent de fermer un couloir bien pratique, ou peut-être que vous n’avez tout simplement pas le choix !

D’autres cartes sont ouvertement négatives, comme les « alarmes » jouées obligatoirement sitôt piochées sans aucune parade possible, et qui vous somment de défausser 5 cartes de la pioche, réduisant de fait le temps qu’il vous reste pour coincer Bandida (au cas où vous n’auriez pas trouvé ça assez difficile, déjà).

Une difficulté revue à la hausse ? Aïe Aïe Aïe !

Car tout est là et autant vous faire à l’idée : la difficulté de Bandida a clairement été revue à la hausse, et il faudra de longues heures de jeu et de pratique avant d’espérer une victoire. Certes, les objets peuvent venir en soutien, mais les possibilités de coincer Bandida sont bien plus faibles. À titre d’exemple : Bandido comportait 21 cartes « cul de sac » contre seulement 13 pour Bandida. Honnêtement c’est chaud chaud chaud.

Les objets sont nos amis. Enfin, des fois.

Les objets sont la seule réelle nouveauté de Bandida, et une nouveauté vraiment chouette sur le papier. Les premières parties, d’ailleurs, sont plutôt fun, quand on découvre leurs effets positifs et parfois pervers.

Prenons l’exemple du plan. Son effet est de détruire deux sections de tunnels déjà posées. Si votre labyrinthe était en vrac, c’est parfait et cela vous aide à vous débarrasser de cartes gênantes offrant trop de possibilités de sortie. Mais quand vous êtes proche de la victoire, cela devient le drame, car cela vous obligerait à rouvrir des sections fermées.

Vous allez me dire : « bah y’a qu’à pas jouer cette carte ». Certes, sauf qu’elle vous bloque un espace de votre main que vous allez vous traîner tout au long de la partie. Et pire encore, vous pouvez très bien, à force de faire de la rétention de cartes, vous retrouver avec trois cartes moisies en main, et l’obligation de jouer l’une d’entre elles à un moment ou un autre !

L’un des objets, particulièrement cruel de ce point de vue, c’est la « casse d’outil ». Ces cartes vous permettent de poser un segment de tunnel souvent arrangeant, mais la contrepartie c’est que vous n’avez plus le droit de piocher de nouvelles cartes tant que votre main ne sera pas vidée (et que vous aurez joué malgré vous les cartes que vous ne vouliez justement PAS jouer). Intense… mais parfois vraiment frustrant.

Sauvez Bandida (mais c’est un peu pareil que de l’attraper) !

Une fois que vous aurez échoué à une dizaine de tentatives, et que Bandida vous aura donné la fessée, vous chercherez donc naturellement à rejoindre ses rangs. Un second mode de jeu est en effet dédié au fait de sauver Bandida en parvenant à connecter son réseau de tunnels à une carte échelle, présente en un seul exemplaire dans le jeu. Il faudra donc fermer tous les tunnels par des culs-de-sac, et en fermer un par l’échelle. Passée la première seconde d’excitation, on se ravise en réalisant que c’est exactement le même gameplay, rendu encore plus complexe par la nécessité de trouver une carte « cul de sac » unique dans un vaste deck et de fermer toutes les autres issues. On ne pourra pas dire que la nuance entre les deux modes de jeu saute vraiment aux yeux.

Un dernier « mode » vous propose de mixer Bandido et Bandida, ce qui est pour le coup particulièrement prometteur. Mais cela se révèle au final être un simple gadget… car seule la carte de départ de Bandido est utilisée (et elle n’est pas incluse dans Bandida, ce qui est un peu avare). Dans ce mode de jeu il faut sauver Bandido ET Bandida en reliant un parcours commun à un réseau de tunnels fermé par une échelle, et bloquer tous les autres tunnels. Parce que la difficulté devait être trop light, sans doute, pour qu’il soit nécessaire de rajouter une carte ouvrant 6 nouveaux tunnels dans le jeu… Alors non seulement il aurait été sympa qu’Helvetiq glisse cette fameuse carte de Bandido directement dans la boîte (parce que là c’est juste du teasing pour dire « achetez Bandido », y’a UNE carte qu’on va utiliser dedans), mais on aurait surtout aimé que le mode de jeu apporte véritablement une expérience de jeu différente, ce qui n’est absolument pas le cas.

Et avec les marmots, alors ?

Sans surprise, la très grande difficulté du jeu rend l’expérience de jeu rapidement frustrante pour les marmots. Ils essayent une dizaine, quinzaine de parties et renoncent, car ils ont l’impression que la victoire est impossible sans une optimisation totale de chaque carte jouée. Pas de fun, donc, mais la frustration d’un puzzle game vraiment compliqué au vu de l’âge annoncé. Si vos enfants de 6 ans arrivent à s’acharner assez pour subir défaite après défaite sans broncher, Bandida aura peut-être une chance chez vous. Ici ça n’a pas été le cas, et nous avons rapidement ressorti Bandido pour des parties plus fluides et plus réjouissantes.

Bandida et Bandido

De notre point de vue, Bandida est tout à fait dispensable si vous voulez jouer avec vos enfants. Autant Bandido est toujours un énorme plaisir de jeu, car même lors des défaites on sent que la victoire est presque à portée, autant Bandida frustre du fait de la sensation que la victoire est inaccessible et que la moindre erreur de placement est irrattrapable. Ça n’en fait évidemment pas un mauvais jeu pour autant, car le principe est toujours aussi catchy et plaisant, et les objets sont une bonne idée en soi. Mais le jeu est bien trop méchant pour se laisser jouer avec plaisir. Une conclusion à laquelle il nous a fallu nous rendre après des séries de défaites et quelques très rares victoires, décidées dès les premiers tours de jeux par une pioche de mains de départ favorables, nous privant de toute satisfaction de réussite construite.

L’avis de Plateau marmots

C’est compliqué. Nous aimons tellement Bandido qu’on aurait vraiment aimé adorer Bandida. Et sur le papier, il semblait vraiment prometteur avec des objets, des effets, et un rythme de partie haletant. Las, sa difficulté est vraiment décourageante, et les modes de jeux annoncés ne sont au final que des trompe-l’œil pour de légères variantes (qui rendent le jeu encore plus difficile, de surcroît). Il serait pourtant faux d’en déduire que Bandida est un mauvais jeu, car il apporte malgré tout son lot de nouveautés et certains effets (comme les alarmes) sont vraiment plaisants à jouer. Mais, pour nous, c’est un jeu qui ne s’adresse qu’aux professionnels de Bandido, soucieux d’avoir enfin un challenge à leur mesure. Pour les marmots, c’est vraiment too much, hélas.

Après quelques parties, Bandida retourne donc dans sa boîte et n’en sort plus. Coincée pour de bon. À quand un Kid Bandido, pour les 4 ans et plus ?

L’avis complémentaire d’Emy :

Avec mon loustic, qui a bientôt 8 ans, nous ne connaissions pas Bandido il y a encore quelques mois. Découvert grâce au Print&Play, dans sa version Covid mise à disposition par l’éditeur, nous avons donc passé quelques belles soirées sur ce jeu coop, lors du confinement. Cette version étant une version allégée, très vite la question d’acquérir le jeu a été mise sur le table : Ah ah ! je les entends encore, tous, dans l’équipe me dire qu’il fallait que nous comblions ce manque ludique dans notre vie, Marmot et moi, en jouant à Bandido, au moins une fois ! C’est donc pleine d’espoir que j’ai sauté sur Bandida dès sa sortie pour enfin découvrir le jeu dans sa globalité.
Et quelle déception ! Sur papier, le jeu fonctionnait comme Bandido, à la différence près qu’il y avait les objets qui semblaient apporter un vrai plus à l’expérience de jeu… oui, sur papier ! Car en réalité, ils nous ont gâché presque l’intégralité des parties. Alors que nous pensions enfin voir le bout du tunnel (sans mauvais jeu de mots), systématiquement, une dynamite ou un plan nous obligeaient à poser des cartes indésirables ou en retirer certaines qu’on avait eu bien du mal à poser. Et au fur et à mesure des tours de jeux, j’ai vu la frustration et la tristesse grandir dans les yeux de mon fils qui a fini par sanctionner notre dernière partie par un solennel : « Maman, ton jeu il est nul, injuste et trop difficile, je préférais le Bandido rose » (NDLR : le Bandido Covid). Ceci a fini de sceller le sort de Bandida qui, depuis, prend la poussière sur l’étagère… (ou meurt de faim dans sa prison, au choix !)

A mes yeux, le jeu ne doit pas jamais être source de tristesse, de colère ou même de frustration trop grande pour un enfant et là, on est pourtant en plein dedans : aucun challenge (on est quasiment sûrs de perdre à chaque fois) et donc aucun plaisir chez nous… juste un arrière goût d’inachevé à la fin de la partie et pas vraiment l’envie d’y revenir à nouveau…
Vous l’aurez donc compris, je rejoins la déception d’Olivier, et garde l’espoir secret d’un jour essayer son grand frère pour connaître les vraies belles sensations ludiques qu’est capable de provoquer ce jeu.

On aime

  • Toujours aussi ingénieux
  • Les objets, ajout malin

On aime moins

  • Beaucoup trop difficile
  • Moins fun que Bandido
  • Un aléatoire encore plus perceptible
  • Les modes de jeux, pas loin d’être identiques

Le trouver

Chez Philibert
Chez Ludum
Chez Parkage
Chez Magic Bazar

Fiche technique

  • Un jeu de Martin Nedergaard Andersen
  • Illustré par Odile Sageat
  • Edité par Helvetiq
  • Pour 1 à 4 joueurs
  • A partir de 6 ans (mais BEAUCOUP trop dur à cet âge)

 

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