Test – The One Hundred Torii

Avez-vous déjà remarqué les arches qui ornent les illustrations de certains jeux de société sur le thème du Japon ? Aussi loin que remontent les origines de ce pays, ces édifices sont omniprésents : ce sont des Torii. Les Torii peuvent se composer de pierre, de bronze, de bois… souvent peints d’un rouge vermillon, couleur réputée pour éloigner les mauvais esprits.
Ces arches symbolisent, dans l’histoire du Japon, un portail qui permet le passage du monde des vivants au monde des esprits. De nos jours, ils servent également de repères pour localiser les temples et sont érigés en guise d’offrande aux déesses.
Quoi qu’il en soit, croiser un Torii sur son chemin a une symbolique forte : il marque l’entrée dans un lieu sacré empreint de poésie et de spiritualité.

C’est donc emplie de zénitude que je m’apprête à vous faire voyager dans ce magnifique jardin japonais que nous propose de construire The One Hundred Torii, un jeu de Scott Caputo, développé par Eduardo Baraf et illustré par Vincent Dutrait pour 2 à 4 promeneurs de 8 ans et plus.


Au commencement, un porche…

Saisir The One Hundred Torii entre ses mains, c’est comme accepter une invitation au voyage : la boite fait tout simplement rêver ! Fort d’une thématique bien ancrée, Vincent Dutrait nous fait entrer dans ce magnifique jardin japonais en traversant un de ces Torii, dessiné sur les contours de la boite de jeu.

Pour la petite histoire, The One Hundred Torii est un jeu issu d’une campagne participative sur Kickstarter, en 2019, et force est de constater que la quantité de matériel présente dans la boite s’en ressent : on a de quoi faire !

En soulevant le couvercle, on découvre toute la panoplie du parfait paysagiste qui va nous servir à ériger le plus beau jardin (mais surtout le plus attractif en termes de points de victoire) : des tuiles « Jardin », des jetons éléments, améliorations et personnages mais également des tuiles récompenses et deux petits Meeples en bois qui symboliseront le Poète et le Samouraï.


Le tout est en carton assez épais et un mode d’emploi nous explique comment tout bien organiser dans la boite pour que celle-ci ferme, sans encombres, une fois la partie terminée.

Etant très sensible au matériel, j’ai été séduite par la promesse de ce dernier, d’autant plus que les illustrations sont magnifiques et véritablement immersives. J’ajouterai même une mention spéciale pour la règle du jeu et ses 4 dernières pages qui nous livrent toute une série d’informations sur la culture japonaise : la fonction de chaque élément décoratif, la symbolique des Torii, le rôle de chaque personnage. De quoi pouvoir satisfaire la curiosité de nos marmots et trouver réponse à presque toutes leurs questions.

Sans compter que Vincent Dutrait a même ajouté, à la fin du livret, une note explicative sur la démarche créative liée aux illustrations et, croyez-moi, cela accentue véritablement l’immersion dans le jeu.

Un vrai sans faute pour le moment !

Un bon jardinier doit avoir de bons outils

La préparation du jeu est très simple (le rangement sera plus laborieux, multitude de jetons oblige!) et la mise en place est identique que l’on décide de jouer à 2-3 ou 4 joueurs : seul le nombre de tuiles jardins et de tuiles récompenses présentes sur la table sera modifié.

Je préfère vous prévenir de suite : prévoyez de la place ! Car les éléments de jeux sont nombreux et il vous faudra tout de même réserver un espace central pour l’aménagement de votre jardin.

Disposez donc, sur la table, l’intégralité des tuiles éléments (les petits jetons représentant des cailloux, bassin de pierre, ponts etc) ainsi qu’un nombre de jetons améliorations et personnages équivalent au nombre de joueurs (2 tuiles de chaque sorte si vous jouez à 2 par exemple) puis installez les tuiles récompenses liées à ces derniers à proximité.

Mélangez les tuiles jardin, distribuez-en deux à chaque joueur et placez le restant de la pile face cachée, à portée de tous. Placez la tuile de départ de votre jardin au centre de la table, distribuez deux pièces de monnaie à chaque joueur et voilà, vous êtes prêts à démarrer la partie !

Bêcher Piocher, Semer Placer et… Récolter !

Bon… il va falloir créer un jardin, vous avez deviné… en posant des tuiles, ça aussi, vous l’aurez compris… mais comment agence-t-on tout ça pour gagner la partie ?

Eh bien , c’est très simple : lors de son tour de jeu, le joueur va d’abord piocher une tuile, pour en avoir 2 en mains, puis en choisir une qu’il va placer dans le jardin central.
Dans quel but me direz-vous ? Et bien pour gagner de précieux jetons éléments, pardi !

En effet, chaque tuile jardin se compose d’un ou plusieurs chemins, qu’il va falloir accoler pour former une route, ainsi qu’un ou plusieurs dessins correspondants aux jetons éléments que vous avez précédemment disposés sur la table.


Le but du jeu va être de disposer les tuiles jardins de façon à ce que deux éléments identiques (deux ponts, deux pierres, deux lanternes…) se retrouvent sur le même chemin et, par dessus tout, de vous débrouiller pour que le chemin ainsi formé soit le plus long possible.

Pourquoi me direz-vous ? Eh bien parce que chaque tuile qui composera ce fameux chemin vous permettra de récolter un jeton élément correspondant aux deux éléments reliés.
Donc plus c’est long… plus c’est rentable (ah ah, je sais que vous avez pensé à toute autre chose, petits filous !!) et plus vous gagnerez donc d’éléments à la fin de votre tour de jeu. 1+1+1+1…C’est mathématique !

Trop fastoche : y’a qu’à faire une ligne droite pour gagner !

Ah ah, je l’attendais celle-ci ! Eh bien, figurez vous que ce n’est pas si simple…

Les jardins japonais sont grands et les promeneurs un peu fainéants sur les bords… Si votre chemin relie deux éléments mais qu’un troisième élément identique se trouve sur votre route, ce sera cette tuile là qui sera retenue pour le décompte de la longueur et non pas la plus éloignée. Adieux vos espoirs de récolter 15 ressources, vous voilà avec un seul petit puits en poche, c’est ballot.


La tuile posée permet de créer un chemin entre 2 bassins de pierre et sa longueur permet d’en récolter 4 entre la tuile de départ et la tuile posée. Si elle avait été posée dans un autre sens, elle aurait permis de relier 2 lanternes mais le joueur n’aurait récolté que 2 lanternes sur ce même chemin puisque la lanterne présente sur le carrefour de droite écourte la promenade.

Mais… j’avoue… je n’ai pas été tout à fait honnête avec vous !
Car même les chemins les plus courts pourront être très fructueux !

Souvenez-vous, en introduction, je vous parlais des Torii, ces arches sacrées. Si vous y regardez de plus près, vous verrez qu’un certain nombre de ces Torii sont dessinés sur les tuiles : des rouges mais également des bleus.

Les Torii ont une fonction très importante dans le jeu car ils vont vous permettre d’augmenter considérablement votre récolte :
– Chaque Torii rouge sur le chemin entre l’élément A et B vous permettra de récolter un jeton élément supplémentaire de même type que celui relié. 
– Chaque Torii bleu sur le chemin entre l’élément A et B vous permettra, quant à lui, de récolter un jeton élément supplémentaire ; son type devra être différent de l’élément relié par ce chemin.

Attention toutefois : pour qu’un Torii soit comptabilisé, il doit se trouver sur le chemin emprunté (et non pas sur l’un des autres chemins non utilisés) de la tuile.
Il faut donc véritablement traverser le Torii pour pouvoir bénéficier de son effet.

Le chemin créé avec la tuile permettra au joueur de récolter 4 puits pour la longueur de la route + 2 puits pour les Torii rouges + 2 éléments de son choix (autre que le puits) pour les 2 Torii bleus traversés.

Bien choisir sa tuile est donc primordial, vous voilà prévenus !

Le long chemin de la vie…

J’entends déjà la foule gronder : oui, plus le jeu va avancer, plus il va être difficile de faire de longs chemins sans y rencontrer LA ressource qui écourterait la balade et cela devient vite un vrai casse tête de récolter les jetons éléments.

Mais… non! Car l’auteur est malin et il sait bien que se promener seul, c’est vite lassant.

Il nous propose donc de nous faire accompagner par 5 personnages différents au cours de notre périple : Le Marchand, le Jardinier, la Geisha le Poète et le Samouraï.

Bon , évidemment, rien n’est gratuit dans la vie, alors chacun d’entre eux présentera un coût à payer pour pouvoir bénéficier de son aide, coût qui pourra être payé soit en jetons éléments soit en pièces d’or (les deux distribuées au début de la partie).

Dans tous les cas, sachez-le : leur pouvoir est grand et leur aide précieuse !

Certains vous permettront de cacher un élément du chemin (super utile pour éviter les promenades raccourcies), d’autres vous permettront de piocher de nouvelles tuiles, d’autres encore, de “réserver” un emplacement pour éviter que vos adversaires ne vous le piquent ou enfin de pouvoir poser 2 tuiles d’affilée à votre tour de jeu pour jouer LE coup super rentable en termes de gain.

Allez, je vous fais une confidence : nous ne les utilisions pas trop, Maël et moi, lors de nos premières parties… Mais on a vite compris (lui plus vite que moi d’ailleurs, ahlala ces marmots !) que négliger leur intérêt était une erreur car ils permettent parfois de se sortir de situations assez inconfortables.

Amasser, amasser : et le minimalisme dans tout ça ?

Ah ah, vous êtes malins, vous avez remarqué que je n’ai pas encore évoqué l’utilité de cette belle balade !

Dans The One Hundred Torii, on se promène, on ramasse plein de champignons jetons éléments et au final, on en fait quoi de tout ce joyeux bazar ? Ben quoi, marcher c’est bon pour la santé bien sûr ! Ouais, non, je manque de crédibilité sur ce coup-là… 

Plus sérieusement, la règle d’or dans ce jeu pourrait se résumer aussi simplement que ça : plus tu consommes, mieux tu te portes ! Car les jetons éléments amassés tout au long du chemin vont vous rapporter de précieux points de victoire. 

Le principe est en fait assez simple : si on amasse 5 ponts, on les échange contre le jeton récompense “pont – 5 points” ; si on en récupère 5 de plus, on tourne le jeton récompense sur la face verso; il vaut maintenant 10 points.
Cette règle s’appliquant à chaque élément différent, vous pouvez donc gagner jusqu’à 60 points si vous vous débrouillez bien.

Mais ce n’est pas tout : le premier joueur à avoir récolté assez d’éléments pour les transformer en 6 jetons “récompense 5” gagnera 5 points en plus (via une tuile dédiée) et dès qu’il aura 3 jetons récompense sur la face 10, il gagnera encore 5 points supplémentaires.


Concernant les personnages, plus vous les solliciterez, plus vous gagnerez de points de victoire à la fin de la partie : le premier appel à un ami vous octroiera 2 points de victoire, le second appel au même ami, 4 points de victoire (verso de la tuile)
Comble du comble : si vous êtes vraiment super sociable et que vous êtes le premier à l’appeler une troisième fois, vous gagnerez alors la précieuse tuile récompense 3 points qui lui est associée. Et celle-ci est précieuse : il n’y en a qu’une ! Il faudra donc être le plus rapide.

Et vous l’aurez compris : celui qui, au moment de la pose de la dernière tuile (ce qui sonne la fin de la partie), aura le plus de points au cumulé remporte la partie !

Et les marmots ils s’en sortent ?

Alors, pour être tout à fait honnête : dans les première parties, non.

The One Hundred Torii est un jeu de placement de tuiles mais, par dessus tout, c’est un jeu d’optimisation. Il faut sans cesse réfléchir à son prochain coup et essayer de le rendre le plus rentable possible. Car les parties sont courtes, très courtes… et prendre du retard sur l’accumulation de ressources n’est jamais bon !

Lors des 2-3 premières parties réalisées, mon marmot ne réfléchissait pas plus loin que le bout de son nez, il posait les tuiles dans son coin, prenant ça et là 1 pont puis une lanterne, et les scores étaient très disparates en fin de partie. J’ai eu peur qu’il ne veuille d’ailleurs pas y revenir… Mais Torii a ce petit truc bien à lui, cet univers qui nous invite à y revenir encore et encore pour nous y balader. Alors Maël y est revenu, une fois, deux fois…

Passé ce cap, la magie opère ! Il y a comme une espèce de déclic dans leur petite tête d’anges : on les voit commencer à observer le jeu du voisin, leurs tours de jeux se font plus longs, ils posent la tuile ici puis là avant de définir la position définitive et comble du comble : ils dépensent même leurs précieuses ressources pour utiliser les personnages.

Et ni une ni deux, sans savoir trop comment, vous le voyez prendre 4 ponts et 7 pierres parce que son poète a caché le nénuphar et que donc sa route fait 15 km de long et qu’en plus il passe par 10 Torii et que donc il peut prendre 3 tuiles récompenses. Vous le sentez le désespoir de la maman qui sait qu’elle va perdre ?

Car oui ! The One Hundred Torii permet une belle courbe de progression pour le marmot et ça, on aime !

Alors soyons clairs : la magie n’opèrera certainement pas avant les 8 ans annoncés sur la boite, même après quelques parties. Et elle opèrera également difficilement si le nombre de joueurs autour de la table est trop grand. Car comme dans tout jeu d’optimisation, où surveiller l’adversaire est primordial, plus on est, plus la projection du marmot devient difficile car  il doit tenir compte de tout ce que pourraient faire potentiellement les joueurs avant lui.

L’avis de Plateau Marmots :

The One Hundred Torii a été une jolie découverte que nous avons néanmoins mis un certain temps à apprécier à sa juste valeur : la longueur des règles et l’apparente complexité de celles-ci ont rendu nos première parties laborieuses. 

Si je dis “apparente” c’est parce qu’en réalité, une fois lancée, la partie est très fluide, et autant le jeu peut être très difficile à expliquer, autant il est facile à jouer. Les actions ne sont finalement pas si nombreuses et s’enchainent assez logiquement entre elles ce qui facilite la prise en main du jeu par les marmots.

The One Hundred Torii est devenu au fil du temps, un jeu qu’on sort volontiers entre deux jeux un peu punchy, lorsqu’on a envie de se faire une partie calme mère/fils, Maël et moi.

On aime la poésie qui se dégage des illustrations et plus les parties s’enchaînent, plus on apprécie le jeu, qui délivre toute sa saveur au fur et à mesure qu’on y joue. Il propose une jolie courbe de progression dans l’appréhension des mécaniques de pose de tuiles  (et de prise en compte de leurs effets) pour les marmots, tout en douceur. 

Avec mon 8 ans, la configuration 2 joueurs reste celle qu’il a préférée : déjà pour la durée de la partie (comptez 30-35 minutes à 2 joueurs  – à trois joueurs on avoisine les 45-50 minutes) mais aussi parce qu’il est plus simple pour lui d’observer ma stratégie, l’analyser et la dupliquer (souvent de manière plus efficace d’ailleurs). Une fois, le marmot bien à l’aise avec toutes les possibilités du jeu, les parties à 3 joueurs et plus pourront alors être envisagées.

Pour ma part, je le répète, je vous conseille vivement de ne pas tenter l’expérience avec des marmots en-dessous des 8 ans car le risque est grand de les voir perdus face au jeu et de se détourner de ce type de mécanique, pourtant très maligne et plaisante, dans vos futurs jeux. 

Prenez d’ailleurs le temps de vous plonger en solo (ou en duo) dans les règles avant de poser le jeu devant vos chères petites têtes blondes. Cela vous laissera le temps d’en appréhender chaque subtilité et de leur présenter de manière fluide et efficace lorsqu’ils découvriront le jeu à leur tour : croyez-moi, leur expérience n’en sera que plus plaisante.

Concernant le mode solo proposé par l’auteur, je me dois de vous en dire un mot : je le déconseille vivement, du moins, avec des marmots.
Ayant testé par moi-même, je l’ai trouvé très laborieux avec des multiples actions rajoutées et des incessants allers et retours dans la règle, ce qui me semblait rédhibitoire pour un enfant de 8 ans. Autant un adulte va accepter d’aller vérifier chaque élément dans le livret à chaque tour, autant un enfant si jeune ne le fera jamais et passera à côté de l’expérience de jeu. 
Sans compter que le niveau de l’automa est assez élevé, même en mode débutant et c’était très risqué d’un point de vue “frustration du marmot”. A réserver, donc, selon moi, aux marmots les plus vieux et/ou aux parents qui veulent s’entraîner un peu entre deux parties !

On aime :

  • La beauté des illustrations
  • La fluidité des parties
  • Le petit livret explicatif à la fin des règles

On aime moins :

  • Le mode solo inadapté à des marmots de 8 ans  
  • Les marmots finissent très vite par être de meilleurs paysagistes que nous !
  • Expliquer le jeu à l’écrit : c’est plus facile à jouer qu’à expliquer ^^

Fiche du jeu :

  • Une jeu de Scott Caputo 
  • Très joliment illustré par Vincent Dutrait
  • Développé par Eduardo Baraf
  • Edité chez Pencil First Games
  • Pour 1 à 4 apprentis paysagistes (mais plutôt 2 à 4)
  • De 8 ans et plus

Où le trouver ?

Chez Philibert
Chez Ludum 
Chez Parkage
Chez Magic Bazar

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