Jouer avec ses enfants, mais pourquoi faire !?
Si l’on en croit les spécialistes, jouer avec vos enfants serait un moyen extraordinaire de participer au développement de leurs capacités. Peut-être, mais les vôtres de capacités, qui y songe, hein ? A priori vous savez déjà lire écrire et compter, alors avez-vous vraiment besoin de jouer au “Verger” pour savoir reconnaître une pomme d’une prune ? Menons l’enquête !
“Jouer avec des enfants, quelle idée bizarre !”
Ben oui, autant poser carrément la question : jouer avec des enfants, pourquoi faire ? Leurs jeux sont tout pourris, trop faciles, et en plus ils s’énervent quand ils perdent. Limite on se demande pourquoi on leur fait des jeux. Bah oui, non ?
N’étant pas éducateur, ne comptez pas sur moi pour vous parler des bienfaits des jeux de société pour vos enfants. Je n’ai pas fait d’études, je ne suis pas pédoludoasmodopsychologue et je n’ai aucun diplôme de la sorte affiché sur le mur de ma chambre. Peut-être que les jeux sont bons pour les marmots, peut-être que l’on pourrait parler de la motricité fine qui se développe en manipulant des petites pièces, du développement des capacités d’observation et de mémorisation, de l’apprentissage des mathématiques (bah oui, pour bouger son pion, faut savoir compter) ou de la lecture. Mais qu’est-ce que j’en sais, hein ?
Et puis après tout, soyons honnêtes : leurs capacités, ils les développeront que vous soyez-là ou pas pour jouer avec eux. Baaah oui ! Sont pas plus stupides que les autres, vos marmots, hein. C’est pas parce qu’ils auront zappé des parties de 7 familles ou de 1000 bornes qu’ils redoubleront leur CM1, hein ? Donc on se calme.
“Jouer avec des enfants, quelle belle idée !”
En revanche, posons les choses très clairement. Que vos enfants s’en sortent sans jouer avec vous, c’est probable. Mais que vous vous en sortiez sans jouer avec eux, c’est plus discutable. Pourquoi ? Parce que ne pas jouer avec eux, c’est passer à côté de moments formidables qui ne manqueront pas de vous donner de jolies leçons de vie. Parce que ce sont des instants rares et précieux que vous ne pourrez pas rattraper ensuite. Parce que même si je ne suis pas le père de l’année, je vous garantis qu’assister au spectacle d’un enfant qui joue, c’est quelque chose de fantastique. Le voir se concentrer pour essayer de mémoriser les règles, entendre les rouages de son cerveau entrer en fusion quand il élabore une stratégie, le surprendre à jubiler quand il prépare un mauvais coup… c’est vraiment quelque chose d’exceptionnel.
On dit souvent que les jeux laissent apparaître la vraie nature des gens, c’est encore plus vrai avec des enfants qui ne se cachent pas et qui jouent toujours “à fond”. Leurs traits de caractère, encore en construction, apparaissent alors au grand jour, le plus souvent pour la plus grande fierté (ou désespoir !) des parents.
Au cours d’une partie de jeu, vos enfants évoluent devant vous, presque en temps réel. C’est rare, magique, précieux. Et si vous renoncez à jouer avec vos enfants, vous renoncez aussi un peu à assister à leur éveil.
Alors franchement, pourquoi se priver de les côtoyer au moment où ils sont les plus libres ? Hein, dites-moi : pourquoi jubilez vous au moment où vous leur enlevez les petites roues du vélo si c’est pour les ignorer quand ils gagneront sans aide leur première partie ?
“Oui mais les jeux de société, c’est toujours des jeux d’adresse tout pourris”
Alors voilà. Si vous vous fiez aux publicités que vous subissez sur les chaînes de télé entre deux dessins animés, c’est certain, le jeu de société c’est juste un truc électronique qui fait beaucoup de bruit, bouffe des piles et qui se casse au bout de dix minutes. Il suffit de voir les rayonnages des magasins de jouets, entre Délir’O Toilettes, 1 2 3 Prout et Baf la mouche, on ne sait que choisir. Ah si, on peut opter pour l’incontournable “Ben Boulette” ou s’achever avec “Dégueulis Party” (non, le cherchez pas, celui-là je viens de l’inventer : je vais immédiatement vendre les droits à Hasbro).
Mais le jeu de société moderne, le vrai, ce n’est pas ça. On en est même très loin. Le jeu de société moderne, ce sont des jeux amusants et variés, réellement adaptés aux capacités des enfants. Ce sont des jeux inventifs, simples d’accès mais profonds à jouer, pour lesquels on ne se lasse pas dès la troisième partie. Ils sont le plus souvent dotés d’un matériel soigné, coloré et agréable à manipuler par les enfants.
Intelligents sans pour autant être prétentieux, ces jeux vous aideront à instaurer des petits rituels, à calmer votre enfant, à faire appel à sa concentration, à sa mémoire, à son observation. Tous ne se valent pas, évidemment, mais le plus mauvais d’entre eux sera pourtant bien meilleur que “Carlo Crado” que vous avez vu samedi dernier en tête de gondole de supermarché.
Donc oui, oui et encore oui, il existe bel et bien des jeux qui participent au premier plan à l’éveil, à l’amusement et à l’épanouissement de votre enfant, et le but de Plateau Marmots, c’est précisément de vous les faire découvrir.
“Oui mais les enfants ils pleurent quand ils perdent”
Alors là je compatis. Si si ! Un marmot qui part en sucette à cause d’une partie perdue, c’est jamais drôle. Les pions qui volent par terre, le plateau de jeu écrabouillé à pieds-joints, les cartes à jouer déchirées, les lettres anonymes de menace de mort… on a tous connu ces scènes de désolation d’après partie, quand le marmot décide d’incendier l’appartement parce qu’il est tombé par malchance sur la rue de la Paix avec quatre maisons.
Plus sérieusement, quand un enfant pleure à cause d’une partie perdue, c’est un excellent timing pour lui expliquer que la vie est aussi versatile qu’éphémère, et qu’il n’y a jamais très loin du Capitole à la roche Tarpéienne. Et s’il ne saisit pas la pleine portée de cette fine allusion, dites-lui juste que perdre “c’est pas grave”, et que ça ira mieux demain.
Mais si votre marmot pleure, c’est aussi de votre faute. Peut-être en effet faudrait-il revoir le choix de jeux auxquels vous les faites jouer. Posez-vous une question bête : pourquoi les enfants pleurent-ils ? Parce qu’ils perdent. Et pourquoi perdent-ils ? Parce que vous n’avez pas le même niveau sur beaucoup de capacités et compétences. Alors une solution s’impose : prenez des jeux qui vous permettent d’avoir un niveau égal à celui de vos marmots !
“Oui mais moi j’y connais rien”
Ca tombe bien : on est là pour ça ! Sans entrer dans les détails, voici les possibilités les plus évidentes qui s’offrent à vous pour jouer des parties équilibrées avec vos marmots :
*** Jouer à des jeux basés sur la mémoire ***
Énormément de jeux pour enfants en bas âge (à partir de 3 ans) reposent sur l’observation et la mémoire. Pourquoi ? Tout simplement parce que c’est un domaine où ils sont plus fort que nous, les adultes. Pique Plume, La Chasse aux Gigamons, L’escalier Hanté, Le labyrinthe magique, La chasse aux monstres… Ce ne sont que quelques exemples parmi des centaines de titres passionnants à jouer où l’enfant, même très jeune, peut battre des adultes à la régulière. Pour vous, en revanche, je ne vous le cache pas : ça va faire mal. Vous allez vous rendre compte que vous prenez un coup de vieux (surtout si comme moi vous avez passé les 40 ans) et que votre mémoire est partie en lambeaux. Du coup vous pourrez pleurer si vous perdez, mais en toute légitimité.
*** Jouer à des jeux basés sur l’observation et les réflexes ***
Le succès de la série des Bazar Bizarre tient en ces deux termes : observation et rapidité d’action. Les enfants sont de véritables machines à réflexes et sont toujours prêts à dégainer les premiers. Nombreux sont les jeux qui leur permettent d’exploiter ces capacités et de vous rappeler au passage que vous êtes presbyte et tout mou. Les enfants sont cruels.
*** Jouer à des jeux qui reposent sur l’aléatoire ***
Non, non et non : ce n’est hélas pas votre Doctorat en supermathématiques de la Sheldon Academy qui vous fera gagner au Jeu de l’oie, aux Petits Chevaux, au Cochon qui rit ou à Serpentina. En effet, ces jeux reposent uniquement sur un lancer de dés ou sur une pioche de cartes. L’enfant a donc autant de chances que vous de gagner ou de perdre. Pour l’enfant, il y aura logiquement autant de défaites que de victoires : autant de raisons de relativiser la portée des deux.
*** Jouer à des jeux coopératifs ***
Incontournables depuis 30 ans, les jeux coopératifs contournent élégamment le problème en plaçant tous les joueurs dans la même équipe, qui affronte le jeu lui-même. Ce sont des jeux réellement indispensables pour les jeunes enfants car ils permettent d’aborder le jeu de société sans le stress de l’affrontement direct avec une autre personne. Là aussi, énormément de jeux ont développé ce principe, de l’incontournable Verger à la récente Forêt Mystérieuse.
*** Équilibrer les parties ***
Tenir compte des capacités de l’enfant, c’est aussi savoir équilibrer les parties en lui donnant plus de possibilités (jouer deux fois de suite, disposer de ressources supplémentaires… ) ou en handicapant volontairement votre jeu. C’est à vous de voir, jeu par jeu, comment vous pouvez donner plus de chances à l’enfant de gagner sans pour autant tricher, mais les possibilités sont nombreuses. A vous d’être inventifs et de faire participer l’enfant à l’élaboration de ces règles spéciales. Bref, c’est comme les petites roues du vélo : cela évite de se casser la binette trop souvent, sans ôter le plaisir de rouler. Et si vous avez des règles “maison” qui fonctionnent bien, nous serons heureux de les diffuser ici même sur Plateau Marmots.
“Oui mais moi j’aime pas jouer”
Ah ça, c’est le grand classique, et c’est souvent la vraie raison qui se cache derrière la plupart des “Oui mais”.
Beaucoup d’adultes n’aiment pas jouer, que ce soit avec des grands ou des petits. Souvent c’est parce qu’ils conservent de mauvais souvenirs de leurs sessions de jeux du dimanche après-midi, avec un Cluedo ou un Monopoly qui finissait invariablement dans les larmes.
Devenus parents, ils “se forcent” à jouer un peu, pour ne pas priver leur marmot, mais ils vivent souvent les parties comme des calvaires dont il est difficile de voir le bout, même quand il s’agit de parties courtes d’une vingtaine de minutes. C’est un sujet difficile pour lequel il n’y a pas de véritable solution. Mais on peut tout de même imaginer quelques pistes…
Le premier conseil à donner, c’est de penser à ces fameux jeux coopératifs. Il n’est plus question d’affronter son marmot, mais de l’aider, ce qui est tout de suite plus motivant ! Toute la tension qui pourrait survenir de la peur de voir l’enfant perdre (ou gagner !) s’évacue d’elle-même. Partez avec lui à la recherche d’un chemin dans Le Trésor des Lutins, ou construisez ensemble la Tour du Dragon. Qui sait, votre appétit de jeu risque peut-être de s’ouvrir en grand ? Et si la fièvre du jeu ne vous touche pas malgré-tout, alors laissez l’enfant gérer la partie et amusez-vous de votre côté à l’observer. Non non, pas de panique : vous ne jouez pas vraiment, vous jouez à jouer. Ca va mieux ? Ouf !
Le second conseil , tout aussi important que le premier, consiste à choisir des jeux qui correspondent à un univers privilégié que vous partagez avec l’enfant. Qu’aimez-vous faire ensemble ? Cuisiner ? Jardiner ? Faire la course ? Alors vous avez de la chance : le monde des jeux de société modernes est devenu tellement vaste qu’il recouvre la plupart des centres d’intérêt existants. Bien sûr les classiques (pirates, princesses, chevaliers, science-fiction, fantômes et autres animaux de la ferme) ont la peau dure, mais soyez-sûrs qu’il existe désormais des jeux sur à peu près tout et n’importe quoi.
Oui vraiment n’importe quoi. Conquête spatiale, boîtes d’oeufs sauteurs, gestion de brasserie, programmation de robots, légalisation du cannabis, conception de smoothie, oui ce sont des jeux qui existent. Quoi que vous ayez en tête, c’est facile : ça existe, ou ça va exister la semaine prochaine. Vous trouverez donc facilement une porte d’entrée vers le monde du jeu (enfant ou adulte) en faisant appel à votre passion. La suite… vous verrez bien une fois les dés jetés.
” Oui mais les enfants ils quittent la partie en plein milieu pour aller faire pipi et ils font rien qu’à mettre des miettes de Choco BN sur mon kickstarter à 200 boules”.
Le truc le plus horrible dans toute cette histoire, c’est que les enfants, ben oui, ce sont des enfants. C’est fou quand on y pense : ils jouent comme des enfants, ces sagouins !!! Or la capacité de concentration d’un enfant se compte souvent en minutes, surtout entre 3 et 7 ans. Il faut donc des parties courtes, afin que l’enfant puisse rester à fond dans sa partie du début à la fin. Et éviter d’embrayer immédiatement sur une autre partie.
La déconcentration entraîne rapidement l’envie de passer à autre chose. Il n’est pas rare qu’un enfant qui vous a tanné pour se lancer dans une partie de jeu vous plante finalement en plein milieu parce qu’il préfère aller faire ses legos. Cela veut dire qu’il a donné le max en terme de concentration, et qu’il ne peut plus suivre le rythme. Il vaut donc mieux privilégier les parties courtes et rapides, plutôt que de se tenter un Scythe ou un Horreur à Arkham.
Ces abandons de partie ne sont pas des ragequits avant l’heure ou une manière de vous dire que votre jeu est tout pourri, loin de là. A vous de prendre sur vous et d’accepter de tout laisser en plan, parfois, parce qu’une association d’idées aura attiré votre marmot loin de la table de jeu.
“Oui mais j’ai pas le temps”
Le quotidien ne fait pas forcément de cadeaux aux parents, qui doivent jongler entre le taf, le ménage, les courses, les couches du petit frère et les devoirs de la grande soeur, sans parler du reste. Je sais, je sais. Mais comme je l’évoquais précédemment, les jeux pour les 3 – 6 ans proposent en général des parties très courtes, de 5 à 20 minutes. Et honnêtement de vous à moi, les yeux dans les yeux, 30 minutes, une ou deux fois par semaine, ça se trouve.
Vous me direz alors que vous n’avez pas envie de vous taper la règle du jeu, que c’est compliqué et que vous n’y comprenez jamais rien, que vous n’avez pas fait polytechnique et que ceux qui rédigent les notices sont des psychopathes (et dans certains cas, vous n’aurez pas tort). Mais comme la vie est bien faite, nous sommes en 2017 et Internet regorge désormais de vidéos pour vous apprendre à jouer aux jeux sans que vous n’ayez besoin de lire les règles. Le plus célèbre d’entre tous, Yahndrev, met son expérience de ludothécaire au service des joueurs en détaillant point par point la règle et la mise en place des jeux, avant de montrer un exemple de parties. A ce jour, il a mis près de 600 vidéorègles en ligne : donc probablement celles d’un jeu que vous possédez. Et pour vérifier, c’est par là : vidéorègles.net
“Oui mais… euh…”
Pour résumer cette page bien trop longue, retenez juste ceci : jouer avec des enfants vous apportera autant de choses qu’à eux. La plupart des objections concernant les réticences des adultes à jouer avec leurs marmots (ou ceux des autres) aux jeux de société ne correspondent plus aux jeux actuels, variés, créatifs et particulièrement adaptés pour installer une paix durable dans les foyers, voire servir de prétexte dans l’installation de rituels quotidiens, genre brossage de dents, dodo ou débarrassage de la table à manger (pour faire de la place pour jouer). Bref, accordez un peu de temps de votre vie, certes chargée, au jeu de société avec vos marmots : vous verrez avec quel plaisir vous redeviendrez tout petits… et tellement grandis.
Ping : Mémoire | Pearltrees
Très bon article. Cependant ma fille à moi adore jouer, mais je supporte pas que.on lui fasse une crasse. Par exemple même sans le vouloir, qu’on lui pique la carte qu’elle voulait à splendor, ou l’emplacement, ou encore qu’on lui mette un feu rouge au mille bornes… je ne.ai pas très envie de nous limiter aux jeux coopératifs je.aimerai qu’elle apprenne/comprenne que jouer ce n’est pas la vraie vie, qu’on l’aime quand même et que perdre ce n’est pas grave. En tout cas les deux en redemandent et moi-même passionnée je prends plaisir à leur faire découvrir ce pays des merveilles.
Oups ma tablette corrige trop de chose. C’est elle qui ne supporte pas … pas moi. Désolée pour les apostrophes manquantes.
Ping : Éducation numérique pour les enfants : Téléphone portable. – A little share