Test – En Quête du Dragon (ma première aventure)

« Ah zut, Théo, tu as manqué ton jet d’esquive ! Raaah, c’est ballot. Bon, alors l’abominable monstre sanguinaire se jette sur toi, t’arrache les entrailles dans des fétides giclées de sang carmin. Alors que tu gargouilles tes derniers soupirs, le monstre se tourne vers la princesse et la déchiquette en deux, avant de se repaître avec gourmandise de son souffle agonisant. Le monde est perdu : mille années de ténèbres vont s’abattre sur le royaume. La mort emportera un à un tous tes compagnons, tes parents et ton doudou. Le voile noir qui envahit tes yeux te laissera quelques secondes encore le poids de ce cuisant et lamentable échec. Fin. Et voilà, bonhomme ! Alors ça t’a plu ? Théo ? Houhou, Théo, ça t’a plu ? Euh Théo ? Théo ? Pourquoi tu te balances d’avant en arrière sur le lit Théo ? Théo ? »

Aïe ! C’est la boulette ? La cata format XL ? Votre dernière campagne de jeu de rôles a plongé vos marmots de 4 ans dans l’abîme des Grands Anciens ? Vos blagounettes sur les éviscérations de maman ne font pas du tout rire votre petit dernier ? Je comprends, c’est dur à admettre. Tout le monde n’est pas un rôliste né, comme vous.

Mais ne range pas ton épée, aventurier ! Les éditions Game Flow ont mitonné une série de bandes dessinées d’aventure spécialement conçues pour être jouées par des tout petits marmots. Le premier tome vient de sortir et a pour titre « En quête du dragon ». Vaste programme !

En quête du Dragon, Ma première aventure, un livre-jeu de Roméo Hennion et Arnaud Boutle pour marmots de 4 ans et plus, édité par Game Flow.

Une histoire, des histoires

On pardonnera d’emblée (enfin j’espère !) le caractère quelque peu elliptique de ce test. En quête du Dragon étant un jeu résolument narratif, il serait fort dommage de vous spoiler les éléments de l’intrigue. Car même si ce sont vos marmots qui partiront à l’aventure, on sait que vous sauterez sur l’occasion de les y accompagner. 

En quête du Dragon se présente sous la forme d’une bande dessinée dont vous êtes le héros. Les pages plastifiées et la reliure spirale ne pourront toutefois qu’attirer l’attention du joueur averti. Oui, ce livre-là ne sera pas manipulé comme les livres ordinaires, ni même comme les livres jeux « à paragraphe » dont vous avez éventuellement pris l’habitude depuis la sortie du Sorcier de la Montagne de Feu, quand vous étiez encore bien jeunes.

La plupart des pages d’en quête du Dragon, en effet, sont découpées en trois. Au moment du choix, il sera alors possible de ne tourner que la partie concernée de la page. Si les lieux sont le plus souvent représentés sur des pages entières, les actions à y mener seront ensuite divisées en trois choix, chacun ayant des conséquences différentes en fonction du personnage que vous incarnez et de l’équipement transporté.

Personnages et équipement

Au début de chaque partie/lecture, le joueur doit choisir quel personnage il souhaite incarner. Trois personnages sont disponibles et vous permettent de voir l’aventure sous un jour (un peu différent) à chaque tentative. Chacun d’entre eux, évidemment, dispose d’atouts qui lui permettent d’accéder à des zones plus compliquées d’accès pour les autres.

Pour cette première aventure, les joueurs pourront incarner une guerrière, un mage ou un voleur. Le voleur sera par exemple tout indiqué pour aller fureter chez autrui, mais gare à son matricule s’il se rend dans une demeure où il a déjà sévi ! À vous de faire preuve de jugeote, et de tirer les leçons de vos essais précédents.

Concernant l’équipement, nul besoin de noter les objets trouvés sur un bout de papier, car le livre propose quatre petits cadrans intégrés dans la couverture. Ils vous serviront à vous souvenir du personnage que vous incarnez, de l’équipement transporté et des bobos subis. Eh oui, car la vie d’aventurier est parfois dangereuse, et on peut se faire (un petit peu) mal en chemin. Rien de grave évidemment, mais ce sont ces bobos qui, au final, déterminant du succès ou de l’échec de l’aventure. Alors prudence.

Une aventure et au dodo !

Le ton de l’aventure, soyons clair, la destine clairement à des enfants de 3 à 7 ans. Les premiers seront ravis qu’on leur fasse vivre l’histoire pour le dodo, et les plus grands seront eux très heureux de la lire tout seuls.

Pour aider les marmots à s’y retrouver, la construction de l’histoire est très linéaire, et les seules bifurcations possibles vont déterminer non pas les étapes du voyage, mais l’équipement gagné et les bobos subis. De lecture en lecture, les voyageurs visiteront donc essentiellement les mêmes lieux principaux, mais ils seront libres à chaque fois de vivre l’exploration de trois manières différentes, avec des possibilités ouvertes ou fermées en fonction du personnage incarné. Dans le village de départ, par exemple, il est possible de se rendre soit au moulin, soit dans la grange soit chez le cartographe, mais quel que soit le résultat de son exploration, l’aventurier se retrouvera forcément dirigé ensuite vers le second lieu. 

Il ne s’agit donc pas d’une aventure dans laquelle on risque de se perdre, et la répétition rassurante du scénario de fond permet de vivre cette Quête du dragon comme un conte aussi poétique que bienveillant. Si papa et maman sont d’accord pour raconter l’histoire, ils auront alors toute latitude pour assurer l’ambiance sonore, avec les bruits et les dialogues, bien évidemment.

Heroic fantasy zen

Je vous rassure d’emblée : vos marmots n’auront pas de gobelins à trucider et de dragon à occire : l’aventure sera exempte de combats ou de violence barbare. Et même si le dragon devait, à un moment donné, se prendre un coup de marteau sur la truffe, il ne s’agirait là que d’une amicale manifestation de notre envie d’attirer son attention. Le but de l’histoire, en effet, consiste à voyager jusqu’à l’antre du dragon pour tenter de… l’adopter.

Ce dernier est d’ailleurs représenté de manière très sympathique, plus proche d’Elliott que de Smaug, niveau pedigree. Pas de regard menaçant ni de griffes acérées, on a plus envie d’en faire un doudou géant que de le transformer en pourpoint. Pas de cauchemars d’après lecture à gérer, ouf ! 

Bref, entre ses graphismes enfantins et ses couleurs pastel, nul doute qu’En quête du dragon perdra quelques grands marmots en route, sans doute désappointés par son manque de déviations ou de décapitations sommaires.

Peu importe : ils ne sont clairement pas la cible de cette charmante première randonnée en terre fantasy.

Porte ouverte sur l’imagination

Les petits marmots, quant à eux, seront totalement ravis de gambader tranquillement dans un monde inconnu et d’aller explorer les différentes possibilités offertes par les personnages. À vous de leur servir de guide pour la visite, la revisite, la rerevisite, et leur rappeler leurs précédentes mésaventures quand ils se dirigeront inexorablement vers le même bobo (et après on me dira que les marmots ont de la mémoire, pfff !).

Il faudra quand même les laisser cogiter quelques minutes, ne serait-ce que pour qu’ils trouvent seuls l’utilité des objets qu’ils viennent de glaner en route. Une corde serait utile si on trouvait quelque chose à escalader, n’est-ce pas ? 

De notre côté, on a énormément apprécié le style d’Arnaud Boutle, au dessin à la fois léger et évocateur. C’est lisible, détaillé, et au fil des relectures on se surprend à découvrir des petits détails passés à l’as dans le feu de l’aventure. C’est vraiment sympathique, et l’ambiance est au top.

Une petite aventure ?

Alors, soyons clairs : vous n’embarquerez pas pour une épopée de douze heures en tournant la première page du livre. Il suffira en effet de 6 choix en tout et pour tout pour atteindre la fin de l’histoire. Si votre marmot a de la chance, il peut faire un sans faute et gagner du premier coup, après 10 minutes de jeu. C’est peu probable, mais cela peut arriver, oui. C’est pourquoi nous mettons vraiment l’accent sur les marmots concernés par ce jeu. Ils ont entre 3 et 5 ans et ne sont pas capables de beaucoup plus d’attention/concentration que la durée d’une histoire. Et à cet âge-là, ils ont besoin qu’on leur répète la même histoire à l’envi. Donc la relative faible durée de vie de l’aventure sera compensée par le fait que vous aller la sillonner pendant longtemps.

Le livre, vous le ressortirez ensuite un peu plus tard, quand votre marmot de 6 ans commencera à s’initier à la lecture. Il sera alors un compagnon parfait pour l’inciter à se donner à fond et le lire seul. Mais il est tout aussi évident que les marmots plus âgés (ceux en âge de lire Baïam, par exemple) ne se sentiront probablement que peu concernés par cette chasse au dragon gentillette, sans combat ni challenge. C’est un peu normal : ils ont désormais leurs propres défis à mener.

L’avis de Plateau Marmots 

Très réussi sur le fond comme sur la forme, Ma Première Aventure : En quête du Dragon séduit de par sa maîtrise et son ingéniosité. Si les épreuves à traverser sont attendues, elles n’en demeurent pas moins agréables, voire trépidantes pour un marmot de 3 ou 4 ans davantage habitué à Petit Ours Brun et Peppa Pig. Si cette découverte de la Fantasy pourra donc sembler un peu trop balisée pour des vieux routards de 8 ans, les plus jeunes sauteront volontiers sur l’occasion de croiser leur premier nain dans la forge de la montagne et d’utiliser les chaussures anti-bruit pour tenter une infiltration. On apprécie, en outre, le ton utilisé (accessible, mais jamais gnan-gnan) et la distribution des rôles, avec UNE guerrière et UN mage, ce qui ne peut que nous ravir. En quête du Dragon doit donc être pris pour ce qu’il est : une transition très réussie entre le livre de conte et l’aventure paragraphée. On le sortira encore et toujours avec beaucoup de facilité tant la demande d’aventure est forte. Vivement la sortie des autres tomes annoncés. Une bouffée d’air frais dans la lecture des petits marmots et un appel au jeu de rôles : le cocktail était audacieux, mais c’est une réussite totale. Bravo.   

On aime…

  • Une mécanique originale et réussie
  • Le plaisir de la manipulation
  • Des dessins bienveillants
  • Les cadrans pour noter l’équipement
  • L’absence de fight
  • Le casting de personnages

On aime moins…

  • Qu’il faille attendre pour les autres aventures
  • Réservé aux plus pitchoun des marmots

Le trouver

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Fiche Technique

Un jeu de Roméo Hennion
Illustré par Arnaud Boutle
Edité par Game Flow
Pour 1 joueur
A partir de 4 ans (mais on peut commencer dès 3 ans sans souci)
Année de sortie : 2018


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