Test – La potion des sorciers
Quatre Sorciers et Sorcières particulièrement optimistes décident de créer des potions dans un large chaudron bouillonnant. Oui, mais voilà : quels sont les bons ingrédients à mettre dans le chaudron pour que le mélange soit efficace ? Et surtout : comment faire en sorte de tirer son épingle du jeu et d’être nommé meilleur magicien de l’école ? Il va falloir faire preuve de mémoire (oui), mais de stratégie (aussi), afin de réussir à obtenir son diplôme de mâââââagie !
La potion des sorciers est un jeu de Stefan Kloß et Anna Oppolzer, illustré par Julie Bierkandt. Il se destine à 2, 3 ou 4 petits sorciers, à partir de 5 ans. Comme on s’en doute au vu de la boîte, c’est édité par Haba.
Une potion bien ragoûtante
Sans donner totalement dans le spectaculaire, on ne pourra nier que cette potion des sorciers est bel et bien très accrocheuse. On a grand plaisir à ouvrir la boîte et sortir le matériel, promesse de parties aussi colorées que pétillantes. Ce n’est pas dans le grand spectaculaire comme le fait parfois Haba (Tour du Dragon, Ploufette en Mission), mais cela reste dans la moyenne haute de l’éditeur allemand.
La potion des sorciers est un jeu de mémoire, qui demande de mémoriser l’emplacement d’ingrédients colorés afin de pouvoir récolter des potions. Le but du jeu, on y reviendra, est à géométrie variable en fonction de la difficulté que vous souhaitez donner au titre.
Pour gagner des potions, il faut faire le tour du chaudron !
À chaque tour effectué, le sorcier récolte en effet la potion présente dans la cuillère représentée sur le plateau. Mais n’allez pas pour autant en déduire qu’il s’agit d’un jeu de course, car il sera parfois très utile de laisser passer les autres devant soi. La vie des sorciers est décidément bien subtile !
Dans le chaudron…
Puisque je vous ai mis la mixture à la bouche, autant la détailler. Le jeu se joue essentiellement dans la boîte, composée d’un astucieux mécanisme composé d’une roue colorée et d’une feuille calque. Au final, vous vous retrouvez donc devant un chaudron bouillonnant, composé d’ingrédients qui vont changer bien souvent de couleur.
La boite contient également des pions qui vont s’accrocher sur le rebord de la boite pour en faire le tour, un mécanisme toujours très sympa, déjà vu par exemple dans « Attention Monstres Gloutons ». Le jeu contient en outre pas mal de jetons : des potions de quatre couleurs différentes, des pièces magiques et 20 tuiles ingrédients, disposées face cachée.
Une fois monté (en quelques minutes), le jeu est vraiment agréable à l’œil, très sympa dans un trip « soirée Halloween » pour petits. La partie principale du jeu est évidée en plusieurs endroits pour laisser apparaître les disques qui se trouvent en dessous. Cela va donc bouger… et il va falloir en tirer parti !
Un bouillon magie !
Pour gagner, il faut collecter des potions magiques. La règle dit qu’il faut en avoir 3 identiques ou 3 différentes, mais de la sorte; le jeu va être franchement rapide. On a essayé plein de configurations (4 potions différentes, 3 identiques, 4 identiques…) et notre préférence va à 3 identiques, car cela fait vraiment intervenir un peu de stratégie sans pour autant être trop longuet.
Après un montage très simple, les sorciers sont accrochés sur le rebord du plateau. Il ne peut y avoir qu’un sorcier par case : en cours de jeu, tout sorcier qui en croise un autre se rend sur la prochaine case disponible. Il sera donc fréquent en cours de partie de doubler les autres et d’être doublé soi-même. Cela a son importance, mais rappelez vous que le but du jeu n’est pas d’arriver premier.
Les tuiles ingrédients sont disposées face cachée et chaque joueur place trois pièces magiques devant lui, recto visible.
Le tour de jeu !
Les sorciers vont donc essayer de faire le tour de la boîte pour aller choper la potion présente dans la cuillère.
À son tour de jeu, le sorcier regarde quel est l’ingrédient présent sur la case de son pion. Par exemple une amanite rouge, des vers gluants jaunes, des œufs de crapauds bleus. Ayant cela en tête, il choisit alors une tuile d’ingrédients parmi celles placées face cachée et la retourne afin que tous les joueurs puissent la voir.
Il peut alors se passer plusieurs choses :
- Il n’y a aucun élément en commun entre la case et la tuile retournée. Le sorcier repose alors la tuile. Il ne se déplace pas, mais il gagne le droit de consulter en secret une seconde tuile. Il ne pourra pas l’utiliser ni la révéler, mais il pourra tenter de la mémoriser.
- Il n’y a pas le bon ingrédient, mais il a la bonne couleur. Il peut alors déplacer son sorcier d’une case.
- Il y a le bon ingrédient, mais pas la bonne couleur. Il se déplace alors de deux cases.
- Il y a le bon ingrédient ET de la bonne couleur. C’est le meilleur résultat possible : non seulement il avance de 3 cases, mais il peut en plus retourner l’une des 3 pièces magiques sur le recto.
À quoi servent les pièces ? Mais à gagner des potions, évidemment. Si vous parvenez à retourner les 3 pièces : bim, vous gagnez la potion de votre choix, et vous les remettez ensuite face cachée.
Il est donc possible de gagner des potions de deux manières :
- soit en faisant le tour du plateau (et en prenant celle qui est dispo)
- soit en trouvant 3 fois le combo : ingrédient + couleur (et en choisissant la potion que l’on veut)
« Artoür, cüyër ! »
Les déplacements se succèdent donc de la sorte. Dès qu’un sorcier revient à son point de départ et passe au-dessus de la cuillère qui marque la ligne d’arrivée, il prend une potion de la couleur indiquée ! Et il gagne ensuite le privilège de mélanger le chaudron, c’est-à-dire de faire pivoter les disques d’un cran. Résultat : TOUS les ingrédients correspondants aux cases ne sont plus de la même couleur, et la couleur de la potion gagnée par le prochain joueur qui passe la cuillère ne sera plus la même.
L’ordre de passage détermine donc la couleur de la potion obtenue, chose évidemment très stratégique. De quelle couleur avez vous besoin pour obtenir la victoire, quelle couleur allez vous laisser à vos adversaires ?
Se souvenir de la formule !
Comme on le comprend rapidement, cette potion des sorciers est donc un jeu de mémoire qui repose pour partie sur une base fixe (les tuiles), et sur une base en mouvement (le chaudron). C’est franchement ingénieux, car cela déstabilise volontiers les mémoristes les plus aguerris. On avait repéré où étaient les œufs de crapauds rouges, mais voilà que tout est chamboulé et qu’on a désormais besoin d’œufs de crapauds verts, sapristi.
Et on arrive au premier moment fort du jeu : le choix de la tuile piochée. Parce que rien ne vous empêche de jouer la sécurité et de vous contenter de mémoriser l’emplacement de quatre tuiles, une par couleurs. Ce ne sera pas glorieux, mais vous avancerez toujours au moins d’une case. Cela amène donc le sorcier à choisir. Mais vous pourrez aussi partir à la recherche du combo parfait ingrédient + couleur, qui vous permettra de retourner une pièce et donc de vous rapprocher du gain immédiat d’une potion de votre choix, donc une avancée significative vers la victoire.
De fait, les ingrédients en mouvement nous incitent à renoncer assez vite à mémorise l’emplacement de chaque tuile, afin d’effectuer des petites avancées stratégiques bien utiles. Car à quoi bon avoir repéré où est l’amanite bleue si au tour suivant un adversaire chamboule tout et vous demande désormais d’en trouver une jaune ?
Un peu de stratégie !
Ce qu’on apprécie énormément avec ce mémory à géométrie variable, c’est que mine de rien il demande tout de même un chouïa de stratégie pour doubler la concurrence. Rappelez-vous en effet qu’à chaque tour de circuit vous allez gagner la potion affichée dans la cuillère. Cette potion peut-être très intéressante pour votre stratégie, mais elle peut aussi être totalement inutile. Si vous avez déjà deux potions rouges, gagner une potion bleue ne vous avancera pas à grand-chose dans l’immédiat. Il peut donc être judicieux de freiner votre avancée et de laisser passer vos adversaires devant vous. Ils récupéreront la potion qui ne vous intéresse pas, et ils en feront apparaître une autre ensuite.
Le truc, c’est que pour ne pas bouger, il faut réussir à se souvenir des tuiles qui n’ont rien en commun avec la case où vous êtes, ce qui est paradoxalement plus difficile que l’inverse. Bref, à vouloir faire du sur place, vous risquez bien de mettre dans le mille, de bondir de case en case et de choper cette potion qui ne vous servait à rien. Ce sera toujours rigolo.
Une difficulté ajustable
La règle dit que pour gagner, il faut obtenir au choix 3 potions identiques ou 3 potions toutes différentes. C’est une recommandation sympathique pour jouer avec des petits, car la partie devient alors vraiment rapide.
Pour les plus grands, il nous semble de loin préférable d’imposer une condition de victoire « fixe » en début de partie, qui sera alors la même pour tous les joueurs : obtenir trois potions identiques, ou obtenir trois potions différentes, mais pas de switcher de l’un à l’autre en cours de partie pour matcher avec ce qui vous arrange le mieux.
La règle invite aussi les adultes à choper davantage de potions que les enfants, pour équilibrer les chances, ce qui est plutôt bien vu. Il y a de nombreuses possibilités pour ajuster la difficulté et rendre le jeu plus ou moins long, en jouant avec le nombre de potions à récupérer.
La variante Plateau Marmots
Pour tout vous dire, on a bricolé un truc dans notre coin qui fonctionne très bien avec les marmots un peu plus grands. L’idée c’est de créer des cartes de formules magiques. Vous prenez des petits bouts de papier et vous créez des formules variées sur la base de quatre potions, par exemple : deux potions rouges, une jaune, une bleue. Essayez d’en faire une petite quinzaine.
Avant la partie, vous invitez chaque joueur à prendre un papier contenant la recette qu’il va devoir réaliser. Évidemment, il sera interdit de montrer aux autres joueurs la formule à réaliser avant de l’avoir accomplie. Ce sera un petit objectif secret bien rigolo, et le premier qui obtient les potions nécessaires à sa formule gagne la partie. C’est simple, mais tout le monde s’est beaucoup amusé avec cette variante.
L’avis de Plateau Marmots
Chouette ! La Potion des sorciers met un bon coup de baguette magique aux jeux de mémoire pour les relooker de manière aussi dynamique que plaisante. Car si le jeu repose (une fois encore) sur le bon vieux mécanisme de mémoire, sa relecture est fort intelligente et propose même un peu de stratégie, excusez du peu. Alors certes, le plaisir de tomber pile sur le bon combo est toujours valorisant, mais il sera souvent profitable de jouer malin et de privilégier les coups plus sûrs (mais moins spectaculaires) afin d’avancer à votre rythme vers cette potion qui n’attend que vous.
Le pti coup de génie du jeu, c’est la tentation qui est parfois la nôtre de ne plus avancer du tout et de soudain chercher frénétiquement les tuiles n’ayant aucun rapport avec notre case. Cela permet aux adversaires de récolter les potions sans valeur et de déclencher le rush pour aller chercher celle qui va nous faire gagner… si on parvient à se souvenir de l’emplacement d’une tuile intéressante ! C’est suffisamment retors pour attirer les adultes dans une course fort plaisante, là où les enfants seront plus flamboyants dans leur progression. Deux styles qui s’affrontent dans un jeu franchement joli au mécanisme ingénieux. L’histoire ne dit pas si les grands réfractaires aux jeux de mémoire se laisseront séduire, mais si un jeu peut le faire, c’est bien celui-ci.
Pour moi c’est un grand oui. Les jeux de mémoire ont la vie dure… et parfois c’est vraiment pour le meilleur !
On aime
- Un jeu franchement très joli
- On joue dans la boîte
- Un jeu de mémoire plutôt original
- L’effet tourbillon
- La stratégie possible : jeu “petit bras” ou spectaculaire
On aime moins
- Un jeu de mémoire quand même, évidemment
Le trouver
Fiche technique
La potion des sorciers est un jeu de Stefan Kloß et Anna Oppolzer,
Illustré par Julie Bierkandt
Edité par Haba
Pour 2 à 4 petits sorciers
A partir de 5 ans