Test – Gasha
Le déroulement est toujours le même : un mélange d’espoir, d’envie féroce, et la faiblesse de notre volonté devant les visuels charmeurs qui nous font miroiter l’impossible. L’ennemi est là, devant nous. Il nous nargue, assurément, tout en nous promettant que cette fois-ci les choses vont mieux se passer. Et nous savons qu’il ment, mais nous avons tellement, tellement envie d’y croire. Alors, d’une main un peu tremblante, nous mettons une pièce dans la fente. C’est notre dernière pièce, notre dernière chance. Nous tournons la poignée. Rouages et gravité entrent en action : après une attente qui nous semble interminable, une petite boule en plastique descend le long d’un petit toboggan et arrive à portée de main. Que contient-elle ? Ah, ça, c’est le grand mystère. Un bibelot, un jouet, une gomme odorante, un porte-clés ou une décoration pour smartphone… Mais peut-être est-ce là le dernier bibelot dont nous avons besoin pour achever notre collection ? Peut-être obtiendrons-nous cette ultime récompense, espérée depuis des semaines, voire des mois ? D’une pression parfaite, nous ouvrons la petite capsule de plastique…
Quoi de plus malin, finalement, que de prendre un jeu pour ce qu’il est ? « Hé les amis, si on faisait un jeu de collection qui parlerait de… “collection” ? . Idée lumineuse s’il en est, qui va bientôt vous propulser dans la fièvre de la collectionnite. Heureusement vous ne vous ruinerez pas en vaines tentatives : il vous suffira de craquer une unique fois pour la boîte de Gasha.
Gasha est un jeu (de collection, donc), de Jason Levine, illustré par Christine Alcouffe et Miguel Coimbra. Gasha se joue de 2 à 6 joueurs, à partir de 7 ans (voire avant). C’est édité par Bankiiiz.
[Ce jeu nous a été mis à disposition par l’éditeur afin que nous puissions produire ce bouleversant avis. Ca ne change rien à notre ressenti, mais ça fait super stylé de le préciser.]
Un Gashapon, c’est donc le nom d’une de ces saloperies de merveilleuses machines qui vous délivre un petit jouet en l’échange d’une pièce. En France, ces machines sont plutôt dédiées à vous envoyer des chewing-gums, des balles rebondissantes ou des gommes parfumées. Au Japon, elles sont souvent les dealers les plus craints de ceux qui, comme moi, ont un gout immodéré pour la collection. Ceux qui (au temps jadis) auront joué à Shenmue savent de quoi je parle : la collection de petites figurines SEGA, de petits monstres Pokémon ou de petits éléments de décoration peut vite tourner à l’obsession totale.
Gasha est donc un jeu de collection qui s’appuie sur le phénomène de la euh… collection pour proposer un gameplay à la fois simple, rapide et étrangement envoûtant.
Mettons une pièce dans la machine, pour voir…
Gasha est essentiellement un jeu de cartes, qui vous propose un deck de 75 cartes représentant les Gashas, les petits jouets que vous allez récupérer, ainsi que 35 cartes de collection qui vous permettront de marquer des points si vous parvenez à les compléter.
Le jeu contient également une quinzaine de jetons, qui permettront de déclencher des effets, de gagner des points supplémentaires, et de siffler la fin de la partie.
L’ensemble est fort joli et parfaitement lisible. On aurait presque aimé des illustrations encore plus punchy pour retrouver le côté ultra kawaii (et commercialement agressif) des illustrations des gashapons, mais cela aurait sans doute nui à la lisibilité du jeu.
Les règles du jeu tiennent en 4 petites pages : vous saurez jouer à la première lecture sans le moindre souci.
On tourne la poignée !
Le jeu débute après une mise en place aussi simple que rapide. Une pioche de cartes “Collection” est constituée, plus ou moins conséquente en fonction du nombre de joueurs, et 4 cartes sont placées face visible à la vue de tous. 4 cartes Gashas sont ensuite distribuées à chaque joueur, le restant des cartes Gashas étant divisé en 4 pioches à peu près identiques.
Un certain nombre de bonus (en fonction du nombre de joueurs) est également mis en place face cachée… et la partie peut débuter. Le but du jeu est simple : constituer un maximum de collections pour marquer le plus de points de victoire possible.
Anatomie d’un Gasha et d’une collection.
Il existe 5 surprises différentes : le robot, la poupée, le porte-clés sushi, le bijou radis et le kitsune (petit renard kawaii). Lorsqu’elles sont disposées en pioche, les cartes Gasha sont placées face cachée, mais leur verso n’est pas dénué d’informations importantes. En effet, le verso reprend le visuel d’un gashapon et vous montre ce que vous POUVEZ gagner si vous choisissez cette carte. Pervers, hein ? Concrètement le verso vous montre 2 ou 3 objets : celui que vous allez gagner (représenté au recto) en fait obligatoirement partie. À chaque fois vous aurez donc une chance sur deux (ou une chance sur 3) d’avoir ce que vous désirez. On retrouve ici les mêmes sensations que devant une machine à surprises, ce qui est particulièrement enthousiasmant.
Les cartes collection, quant à elles, indiquent les objets nécessaires pour être remportées. Un symbole « boule surprise » indique que vous pouvez remplacer ce symbole par n’importe quel Gasha. La carte “collection” indique également combien de points vous allez remporter si vous complétez la collection correspondante, et vous donnera (dans la plupart des cas) un demi-ticket coloré. Rassembler deux demi-tickets permet de gagner un jeton bonus, offrant des points de victoire supplémentaires ou des effets de jeu bien pratiques. Il est aussi à noter que ces jetons bonus déterminent aussi la fin de la partie lorsque le dernier est révélé. Si les tickets sont de la même couleur, vous gagnez également une carte Gasha dans les machines, ce qui vous permet de re-démarrer une collection rapidement.
Roulerouleroulepoc
Pour jouer, le joueur dont c’est le tour a le choix entre deux actions.
- Piocher deux cartes Gashas
- Révéler une (et une seule !) collection et prendre la carte correspondante.
Les deux actions ne peuvent être accomplies pendant le même tour, à vous, donc, de ne pas vous faire souffler la carte “collection” qui va bien en vous montrant trop attentiste.
La fin de partie survient lorsque le dernier jeton bonus en jeu est pris. La partie se joue alors au décompte des points, c’est-à-dire :
- Chaque collection rapporte les points correspondants
- Chaque Gasha resté en main rapporte un point
- Les jetons bonus « points de victoire », vous rapportent 3 points
- Les jetons bonus « Gasha » non utilisés vous rapportent 2 points (un par Gasha)
La simplicité totale du tour de jeu est la grande force de Gasha. Le jeu se découvre sans souci dès 6 ans et permet des tours fluides et rapides. Évidemment parfois il vous faudra cogiter pour savoir si vous tentez telle ou telle collection, mais ce sera là le seul frein au gameplay, si épuré qu’il en devient rapidement addictif.
On notera aussi que dès qu’une pioche est vide les cartes restantes sont remélangées pour reformer 4 pioches (toujours), et que chaque carte “collection” récupérée est aussitôt remplacée.
Tout est donc mis en œuvre pour que les joueurs aient toujours le choix de la machine sur laquelle ils vont jouer leur pièce, et ainsi mettre en œuvre leurs premières stratégies de collection.
Malin et addictif
Vous l’aurez compris, le jeu fonctionne à plein avec des enfants, car son côté “je crée une collection en mettant des pièces dans un distributeur” fait totalement mouche. Le tour de jeu étant d’une simplicité totale, il permet d’être découvert et joué très vite, jusqu’à pas moins de 6 joueurs, ce qui crée une ambiance explosive autour de la table. Plus il y a de joueurs, plus les risques de vous faire chiper la carte “collection” que vous visez sont grands, ce qui ajoute une jolie tension aux parties.
On notera aussi que les stratégies sont légères, mais passionnantes. Vous pouvez tenter de jouer les collections en fonction de leurs couleurs de tickets afin de récupérer plus de cartes que vos adversaires en plus des jetons bonus, ou bien tenter les « grosses » collections sans tickets, mais riches en points de victoire. Chaque partie est assez différente en fonction du nombre de joueurs, mais l’effervescence y est signe de grande réussite.
Quelque chose à ajouter ?
Non. Enfin si. Mais pas vraiment. Disons que dans un caprice de collectionneur, ce jeu est typiquement celui sur lequel on aurait pu installer une grosse licence, donnant à la « collection » un sens encore plus mordant auprès des enfants. Je n’imagine pas les ravages d’un jeu identique qui serait brandé Pokémon, Sega (comme dans Shenmue), Marvel, King of Tokyo ou n’importe quel autre univers propice à la collectionnite. Mais cela serait sans doute dénaturer la mécanique même de jeu, basée sur la collection d’opportunité et non sur celle de cœur.
On pourra aussi indiquer que le jeu perd un peu de sa fourberie à deux. On se bat moins autour des cartes “collection” et chacun aura donc un peu plus de marge de manœuvre pour créer ses collections, avec moins de pression subie sur l’urgence de trouver la bonne carte manquante. Les parties à 4 joueurs ou plus sont épiques, en dessous c’est un peu plus serein.
La fin de partie est aussi un peu expédiée. Dès qu’un joueur gagne le dernier jeton bonus, il offre un dernier tour de jeu à ses adversaires… mais pas à lui. Si vous jouez à deux, c’est donc 2 points directement offerts à l’adversaire, sans qu’il ne fasse rien. Il aurait été plus simple que chacun joue le même nombre de tours pour éviter certains déséquilibres du dernier tour.
Une autre mini remarque : le jeu tient facilement dans la moitié de sa boîte (en comptant large. Il faudra donc accepter le fait que les jetons aient BEAUCOUP de place pour s’épanouir. Rien de grave assurément, mais le fait de le savoir à l’avance vous évitera la mini déception à l’ouverture.
L’avis de Plateau Marmots
Attention GROS coup de cœur ! Gasha est simple, rapide et totalement addictif. Gasha vous permet de retrouver le plaisir simple de la collection et des machines à sous, alors que l’on tourne la poignée du bidule pour se retrouver devant une joie intense ou une déception sans fin. L’idée des jetons bonus lorsque des collections sont complétées est tout simplement géniale et permet des retournements de situation aussi vifs que nombreux. C’est intense, palpitant, passionnant, et on enchaîne les parties à l’excès tant le plaisir est présent. Un excellent jeu, vous l’aurez compris, qui joue sur l’épure et l’accessibilité pour des parties auxquelles chacun trouvera un plaisir immédiat. Les plus gros joueurs râleront peut-être de cette trop grande simplicité et du manque de combinaisons possibles parmi les collections, mais dans notre cas, il devient un jeu référence auquel nous avons hâte de rejouer.
On aime
- Malin, rapide et fun
- Très accessible
- Parfaite initiation au jeu de collection
- Jouable jusqu’à 6
- Le frisson de la collection
- Les verso des cartes
- Illustrations choupi
- Plusieurs possibilités de scoring
On aime moins
- Un peu moins fun à 2
- Un dernier tour un peu bizarre
Vos marmots aimeront ce jeu…
- S’ils aiment collectionner des trucs
- S’ils aiment les tours de jeux simples et rapides
Vos marmots risquent de moins aimer ce jeu…
- Si ce sont des vétérans du jeu de collection
Le trouver
Fiche Technique
Un jeu de Jason Levine
Illustré par Christine Alcouffe et Miguel Coimbra
Edité par Bankiiiz
Pour 2 à 6 joueurs
A partir de 6 – 7 ans.