Test – Le Manoir Infernal (la revanche de Parkinson)
Indiana Mulder balaya la salle défraîchie du faisceau se sa lampe torche. Les coffres au trésor étaient là, recouverts de toiles d’araignées et de liquide visqueux. Il n’eut toutefois que le temps de les apercevoir car le Manoir trembla de toute sa structure, et l’aventurier du paranormal fut projeté cul par dessus-tête dans la salle voisine, en compagnie d’un fantôme et d’une araignée géante. Indiana se redressa comme il le put et rampa au milieu du chaos. Peine perdue : une nouvelle secousse le précipita contre les tapisseries trouées du mur du fond. Un globe oculaire géant roula alors dans sa direction, mais il fut percuté par d’énormes serpents surgis de nulle part qui déferlaient par la porte. Alors que le Manoir tout entier vacillait autour de lui, Indiana Mulder poussa un soupir agacé. “Des serpents, évidemment”, maugréa-t-il.
Au vu de ce pitch du Manoir Infernal, qu’allez-vous penser ? S’agit-il d’un jeu de rôles, d’un jeu d’aventure, d’un Dungeon Crawler ? Rien de tout ça, évidemment ! Le Manoir Infernal est un jeu d’adresse incroyable de simplicité… mais aussi de fun. Soyons honnêtes : notre preview du Manoir Infernal nous avait mis l’eau à la bouche. Sur le papier, ce jeu d’adresse sur le thème du vieux manoir hanté avait en effet tout pour plaire.
Encore fallait-il confirmer nos impressions avec un test plus complet du jeu : alors allons-y !
Un manoir très bien fréquenté
Tout commence par la présentation du matériel, sur lequel repose finalement tout le jeu. Pour commencer, apprenez qu’il n’y a pas un seul manoir, mais quatre identiques. Le jeu étant jouable de 2 à 4 joueurs, chacun disposera dans les faits de son propre manoir en 3D, composé de 8 pièces distinctes en deux rangées de 4. Chaque pièce se différencie des autres au moyen d’une couleur unique, ce qui permettra de déterminer l’objectif de la manche en cours.
Le Manoir Infernal propose également une série de pions typés meeples représentant des aventuriers, des araignées, des fantômes, des serpents, des yeux géants et des coffres aux trésor. Chacun des jetons possède une forme et un poids très distincts des autres, ce qui aura une importance cruciale dans le déroulement de la partie.
Le jeu propose également un deck de cartes recto verso, représentant des salles du manoir au recto, et des meeples au verso, et une règle du jeu qui tient sur deux pages : éloge à la simplicité.
L’ensemble est superbe et donne immédiatement envie de jouer : araignées et fantômes ne demandent qu’à être lâchés dans les corridors residentevilesques du manoir. A titre personnel, j’ai rapidement eu envie de déposer un tout petit point de colle pour fixer la structure de chaque petit manoir, mais c’est tout à fait optionnel.
Il est donc heureux que le matériel ait été parfaitement réalisé, car c’est lui qui va bosser pendant la durée entière des parties… et il va être soumis à rude épreuve.
Un système de jeu simple et génial
Permettons-nous un flashback. Fermez les yeux, et souvenez vous des flacons de savon liquide pour faire des bulles ou de certains jouets distribués dans les machines à tirettes. Certains d’entre eux étaient composés d’un petit labyrinthe en plastique avec des mini billes en acier qui doivent toutes entrer simultanément dans une même zone. Cela vous parle ?
Eh bien Le Manoir Infernal repose totalement sur cette idée. Pour bouger vos pions, vous allez devoir secouer votre manoir dans tous les sens pour essayer de les faire aller dans la direction souhaitée. Evidemment, le jeu va bien plus loin, mais cela vous donnera une idée.
Le principe du jeu, quel que soit le niveau de difficulté choisi, consiste à disposer un certain nombre de pions (aventuriers, coffres et bestioles) dans le manoir du voisin, de tirer une carte “salle” au hasard, et d’agiter votre manoir dans tous les sens pour obtenir que les pions souhaités (mais surtout aucun autre) entrent (et restent) dans la salle requise. Evidemment, vous n’avez PAS LE DROIT de toucher les pions avec vos doigts : vous devrez les déplacer à la force du poignet et pour une fois les parkinsoniens ont une chance réelle de victoire.
Entre hystérie collective et concentration studieuse, chacun secoue donc son petit manoir pour essayer de faire en sorte que cette saleté d’araignée veuille bien se décaler sur la droite pour laisser passer le 3e coffre de l’aventurier. Ne l’oubliez pas : c’est une épreuve de rapidité et il n’y a qu’un gagnant. Si vous êtes le premier à atteindre l’objectif voulu, c’est la gloire : vous gagnez un point. Le souci, c’est que vous gagnez également une bestiole supplémentaire qui s’en va rejoindre votre manoir, et donc vous compliquer la vie.
Le premier joueur qui aura atteint 5 points aura gagné la partie.
Une difficulté modulable
Comme on le devine, le jeu devient donc de plus en plus difficile alors que la partie avance. Plus vous être proche du but, plus votre bestiaire s’est étoffé et plus il est difficile de faire glisser les pions demandés vers la salle “objectif” sans emmener avec vous bon nombre de monstres indésirables. Cette idée de créer un handicap cumulatif à chaque tour est excellente et permet de donner une chance aux moins adroits, qui pourront alors essayer de rattraper leur retard.
Mais le jeu propose en outre 3 modes de difficulté progressifs afin de transformer vos parties en véritable challenges. Car si le premier niveau vous demande de ramener systématiquement l’aventurier et 3 coffres dans une salle tirée au sort, le second vous demande d’y amener la liste complète de pions indiqués sur la carte piochée.
Il faudra alors jouer des spécificités de déplacement de chaque pion pour réussir le challenge, sachant que les yeux roulent vite et que les serpents ont la manie de se prendre dans les ouvertures de portes, voire de les bloquer. Damned.
La troisième niveau de difficulté est de loin le pire. Il ressemble en tout point au second, à ceci près que les pions à rassembler ne sont pas ceux qui apparaissent sur le carte, mais justement ceux qui n’y sont pas. Il faut donc associer petit effort mental au rythme frénétique de déplacement des pions pour ne pas commettre d’erreur. En effet, quelque soit le niveau de difficulté choisi, toute erreur est sanctionnée par la perte d’un point de victoire si durement acquis. De quoi donner envie de vérifier ce que l’on fait avant de hurler “PANIC MANSION”, cri obligatoire qui clôt une manche.
Fort de son système de jeu simple et efficace et d’une difficulté totalement adaptable aux joueurs, Le Manoir Infernal cache derrière ses faux airs de “petit jeu” une subtilité insoupçonnée.
Petits et Grands Marmots
Quand on parle d’agilité, les marmots sont rarement à plaindre, et ils se révéleront adversaires redoutables. En revanche, moins concentrés, ils commettront plus d’erreurs et ce sera pour vous une belle occasion de rattraper votre manque de réflexes par un coup d’oeil plus assuré. En tout cas, tout le monde s’amusera autour de la table, surtout à partir de 7 ou 8 ans. Il est conseillé de jouer à plus de deux, donc à trois ou quatre, pour des parties vraiment chargées en adrénaline.
L’avis de Plateau Marmots
Simplicité, folie et équilibre font de ce jeu d’adresse un titre très réussi, qui ressemble quelque peu à Bubble Jungle pour son idée de cartes “objectif”, mais dans un cadre tellement original et bien mis en valeur que le plaisir de jouer est incomparable. Il y a en effet une satisfaction très enfantine dans le fait de secouer les petits manoirs pour déplacer les pions, et c’est un rush de fun qui nous vient d’un autre âge, brut et sans artifice. Bref, le plaisir de jeu généré par Le Manoir Infernal est un plaisir rare et communicatif que l’on ne peut que recommander. La première impression sur ce jeu était donc la bonne : sous des dehors très simples Le Manoir Infernal est un jeu très réussi qui saura vous galvaniser pendant de très nombreuses parties.
Intérêt ludique : fun et rythmé : un excellent jeu d’adresse
Intérêt pédagogique : aucun, si ce n’est la différence de déplacement des meeples au vu de leur géométrie
Au final : on adore, sans retenue
Le trouver
Fiche Technique
Edité par Blue Orange
Un jeu créé par Asger Harding Granerud
Sorti en 2017
Pour 2 à 4 joueurs
Durée d’une partie : 20 mn
Ping : 2018 sera une grosse année chez Blue Orange ! – Plateau Marmots