Test – Matryoshka

Aujourd’hui, à travers ce nouveau test, nous allons parler « poupées russes ». Attention, il n’est pas question du film de Cédric Klapisch ou de Miss Russie 2019, mais plutôt de matriochkas

Matriochkas ? Il s’agit de ces fameuses poupées gigognes de taille décroissante placées les unes à l’intérieur des autres. C’est un des emblèmes de la Russie qui symbolise la famille et la fertilité. Elles sont apparues à la fin du XIXème siècle et certaines sont de véritables œuvres d’art. De nos jours, elles sont plutôt utilisées comme décoration, et votre marmot en a peut-être déjà trouvé quelques-unes dans le grenier de ses grands-parents.

Mais savez-vous qu’à l’origine, il s’agissait d’un jouet pour les enfants ? Les poupées russes reviennent aujourd’hui sous forme d’un petit jeu de cartes pour 3 à 5 joueurs, à partir de 8 ans, pour des parties de 20 à 30 minutes. Voyons en détail le fonctionnement de Matryoshka, ce jeu de Sergio Halaban, édité par Matagot et illustré par Eduardo Bera.

« Mes précieuses … Où sont mes précieuses ? »

Dans Matryoshka (avec un « y » et un « s » qui est le nom du jeu et de la poupée en anglais) vous allez devenir un collectionneur de poupées russes. En effet, de très anciennes séries de matriochkas (composées chacune de poupées russes de différentes tailles) ont été dispersées au fil du temps chez divers collectionneurs. Une très vieille série complète de matriochkas se vend au prix fort chez les antiquaires. Une grande bourse d’échanges est organisée afin de reconstituer les anciennes séries. Chaque collectionneur souhaite obtenir la plus belle collection : lequel y parviendra ? Sûrement le plus rusé et habile en négociations !

Dans le jeu de cartes Matryoshka, les joueurs ont donc pour objectif de constituer des suites de poupées. Chaque série de poupées a une couleur différente et chaque poupée de la même couleur est numérotée de 1 à 7 (7 étant la poupée la plus grande). À trois collectionneurs, on joue avec 6 séries, à quatre avec 8 séries, à cinq avec les 10 séries présentes dans la boite. Les joueurs marquent des points en réalisant des suites de couleurs et/ou de valeurs selon un barème précis défini dans les règles.

Une partie se déroule en 4 manches de 3 phases.

Mise en place préalable du jeu :

Chaque joueur démarre la partie avec 6 cartes qu’il garde en main bien secrètes. Chaque joueur choisit ensuite 2 de ses cartes et les place devant lui face cachée. Quand tous les joueurs ont choisi leurs 2 cartes, ils les révèlent aux autres joueurs face visible. Ils conservent les 4 autres cartes en main.

Les cartes posées devant chaque joueur vont constituer le « tableau ». En effet, au cours de la partie, chaque joueur présente devant lui aux autres joueurs ce « tableau » en rangeant ses cartes d’une même couleur sur une même ligne, et ses cartes d’une même valeur sur une même colonne. Ce « tableau » évolue et s’enrichit avec de plus en plus de cartes à la fin de chaque manche. Les cartes composant ce tableau sont révélées aux autres joueurs et servent ainsi d’indications sur votre jeu et vos ambitions de collections.

Phase 1, la pioche :

Chaque participant pioche deux nouvelles cartes, pour en avoir 6 en main. Ces cartes servent de monnaie d’échange au cours de la phase 2.

Phase 2, échange de cartes :

Un premier joueur, appelé le « joueur actif », choisit une carte de sa main et la place face visible au milieu de la table. Chaque autre joueur pose une carte de sa main face cachée devant lui en guise de proposition d’échange contre la carte visible. Le « joueur actif » les consulte sans les montrer, en sélectionne une qu’il met dans sa main, et laisse la sienne à celui à qui il a pris la carte.

Le joueur suivant, puis tous les autres, procèdent chacun à leur tour à une proposition d’échange selon ce modèle.

Phase 3, pose de cartes sur le « tableau » :

Tous les joueurs reprennent en main toutes les cartes posées. Ils doivent alors reconstituer un nouveau « tableau » avec des cartes supplémentaires à montrer. On démarre ainsi la partie avec 2 cartes révélées aux autres joueurs. A la fin de la première manche, on en montre 4, puis 6 à la fin de la deuxième manche, puis 8 à la fin de la troisième manche et enfin 13 à la fin de la quatrième et dernière manche. Il est possible de changer à chaque fois de cartes, ainsi les cartes révélées au cours d’une manche peuvent tout à fait être gardées en main lors d’une manche suivante.

Les joueurs piochent ensuite deux nouvelles cartes, de manière à toujours avoir six cartes en main pour les phases d’échange.

« Le compte est bon, vous pouvez démarquer ! »

La partie s’arrête à la fin de la quatrième manche, lorsque les joueurs ont constitué un « tableau » avec 13 matriochkas, c’est-à-dire toutes les cartes en main sauf une carte, au choix, qui sera défaussée.

Seules les colonnes contenant deux cartes et les lignes contenant au moins deux cartes consécutives rapportent des points. Deux cartes d’une collection rapportent 2 points, trois cartes 4 points, quatre cartes 7 points, cinq cartes 10 points (11 points si elles sont consécutives), six cartes 13 (15), sept cartes 16 (19). Bref, vous allez pouvoir sortir vos calculatrices et vos feuilles de comptages !

Bien entendu, le joueur qui accumule le plus de points remporte la partie. En cas d’égalité, le vainqueur est celui qui a la plus longue … série de matriochkas (Une remarque Chef ? ). [Non, c’est bon :)]

« Bon allez, laisse tomber, file-lui ses 30 000 ! »

Au premier regard, Matryoshka pourrait ressembler à n’importe quel jeu de collection de cartes. Les suites complètes d’une même couleur (7 poupées) rapportent beaucoup de points, de même que les grandes séries de poupées de même taille. Naturellement, les séries complètes d’une même couleur sont plus difficiles à rassembler et valent donc plus de points qu’une simple poignée de grandes ou de petites poupées … Mais pour gagner, vous aurez besoin de poursuivre les deux objectifs afin d’être couronné roi des collectionneurs.

Où Matryoshka fracasse le moule des jeux de collection en mille morceaux, c’est qu’il est en fait un sacré jeu de négociation. Le concept du « tableau » qui force les joueurs à afficher une partie de leur collection actuelle est très malin. D’une part, c’est une manière de montrer vos poupées et ce que vous cherchez en retour. D’autre part, c’est aussi un peu de bluff, si vous préférez dissimuler des séries presque terminées dans votre main afin que personne ne puisse vous empêcher d’obtenir LA précieuse poupée finale.

La phase d’échanges de cartes est cruciale et très amusante. Avant de faire le troc, les joueurs voient la poupée proposée à l’échange et les « tableaux » des autres joueurs. Les joueurs les plus habiles en négociation (ou en escroquerie) peuvent tenter ici d’influencer le « joueur actif » et les autres joueurs. Tout est possible ici, n’hésitez pas à gesticuler, crier et à utiliser vos mains et votre regard  Vous pouvez proposer de prendre la poupée disponible à l’échange pour un autre joueur qui semble à la vue de son « tableau » très intéressé par la poupée en question. Mais il faudra au tour suivant qu’il vous propose une excellente poupée en échange ! Vous pouvez aussi proposer monts et merveilles à tout le monde et rien n’offrir en retour … Ou tout simplement être gentil, poli et discret en espérant que tout fonctionne bien à la fin !

Une fois l’échange effectué entre les deux joueurs, un seul joueur sait ainsi quelle carte le joueur actif a choisi, et comment il envisage donc sa collection … A moins qu’il ait bluffé, fait un choix par dépit, ou simplement pris une carte qui ne lui semblait intéressante que pour un futur échange !

« On peut tromper une fois 1000 personnes, mais … »

L’idée du « tableau » est très astucieuse. La pose de cartes se fait toujours face cachée. Les cartes sont ensuite retournées simultanément pour que tous les collectionneurs découvrent les cartes des autres. Il y aura parfois du dépit chez un joueur si une collection bien entamée est également bien représentée chez un concurrent. On a bien sûr intérêt au départ à révéler des cartes de collections peu intéressantes pour que les autres joueurs ne devinent pas nos objectifs de collection et nous proposent lors des échanges des cartes à priori sans intérêt. Mais cela devient de plus en plus difficile au fur et à mesure que la partie progresse et surtout que le « tableau » s’agrandit. Et puis, si vous gardez toutes vos cartes intéressantes en main, qu’allez-vous pouvoir proposer à l’échange ?

Il y a une dynamique vraiment intéressante dans la gestion des informations que vous souhaitez afficher, les cartes que vous voulez garder pour les échanges, ce que vous allez accepter comme compromis et, les échanges que vous allez forcer sur les autres joueurs.

Il vous faudra donc ruser, bluffer, donner de fausses informations sur votre jeu, et réussir à suffisamment être discret sur votre réelle collection pour l’emporter !

Les règles sont fluides et les tours dynamiques puisque chaque joueur a toujours une action à faire durant le tour des autres joueurs.

« Un jeu qui fait facilement de l’œil … de Moscou »

Le design des cartes est absolument magnifique. Bravo Eduardo Bera ! Les cartes ressemblent à une œuvre d’art et rappellent vraiment les véritables matriochkas. Chaque série est très bien illustrée et le joueur est tout de suite attiré par les cartes qu’il a envie de collectionner. Votre marmot va vite tomber amoureux des matriochkas, très joliment colorées.

Néanmoins, les cartes sont assez fines et donc fragiles, surtout qu’elles seront beaucoup manipulées par le jeu des négociations. Prévenez donc votre marmot qu’il soit un peu précautionneux, surtout si vous êtes maniaque comme moi sur la qualité du matériel

Autre point d’attention : les couleurs des cartes. Certaines séries se ressemblent un peu, même si le contour des cartes adopte aussi un design unique pour chaque collection. On a donc parfois tendance à confondre les collections. Je n’ai pas fait le test avec un daltonien, mais c’est un détail qui ne nuit pas au gameplay avec un peu d’attention.

Les règles du jeu sont très claires. Elles donnent des exemples précis concernant la réalisation des fameux « tableaux » et pour le décompte des points.

La boite du jeu est au format poche, ce qui permet d’emporter facilement le jeu avec soi. Attention toutefois, la réalisation des « tableaux » prend de la place et on ne peut donc pas forcément y jouer partout.

L’avis de Plateau Marmots

Matryoshka est un jeu terriblement malin. Au-delà d’un simple jeu de cartes à collectionner, il est un habile mélange entre un jeu de négociation, de calcul et de bluff. Ajoutez à ce cocktail un soupçon de hasard (la pioche dans le dernier tour peut retourner des parties et ruiner des stratégies), et vous trouverez un jeu passe-partout qui plaira à toute la famille. Les parties sont fluides et rapides, les règles simples à comprendre et votre marmot voudra assurément enchainer les parties.

Au-delà de la parfaite mécanique du jeu, la beauté des illustrations des cartes donne tout de suite envie de les collectionner. Cela tombe bien, c’est le but de jeu ! Et si, pour finir, je vous dis que le jeu est à moins de dix euros, cela fait beaucoup d’atouts non ?!;)

Ça fait plaisir

  • Un jeu malin à tout petit budget
  • Un design des cartes magnifique
  • Un savant équilibre entre chance et calcul
  • Un jeu sympathique pour initier votre marmot à la négociation dans un cadre qui change des glaces au chocolat et de la télévision

Ça fait moins plaisir

  • Des cartes un poil fragiles, mais c’est bien pour dire quelque chose !

Le trouver

Chez Philibert

Fiche technique

Auteur : Sergio Halaban
Illustrateur : Eduardo Bera
Éditeur : Matagot
Pour 3 à 5 joueurs
A partir de 8 ans

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