Test – Medieval Pong

Parfois, la création de certains jeux de société est pleine de mystères. A la lecture des règles, ou une fois la boîte ouverte, on se demande vraiment comment l’auteur a pu faire pour avoir l’étincelle d’idée qui a donné naissance au jeu, en mode « mais comment on peut inventer un truc pareil ? ».

 Et parfois, au contraire, on devine TRÈS FACILEMENT le cheminement qui a permis au jeu de voir le jour. On se dit : « ah oui garçon, je te vois venir de loin ». C’est un peu le cas de Poc !, par exemple, un jeu de lancers de sous-bocks, ou encore de Staka, un jeu d’empilement de ronds de serviettes.

Et, vous l’aurez compris ici, c’est carrément le cas avec Medieval Pong. J’extrapole sans doute, mais je vois bien le processus de création de Medieval Pong naître au terme du long (et consciencieux) apéro familial, avec tonton Jean-Pierre s’adressant aux auteurs en ces termes :

« Hé les louzeurs, chuis sûr qu’vouzêtes même pôcap’ de créer un biiiirpong’ pour jouer avec vos morveux ».

Et ce serait un point de départ finalement très acceptable pour vous parler de Mediéval Pong.

Medieval Pong est un jeu d’adresse signé Jonathan Favre-Godal et Didier Lenain-Bragard, édité par Ravensburger. Il s’adresse de 2 à plein de joueurs, à partir de 8 ans (voire franchement bien avant)

« Another Beer, Please »

Au commencement est donc le Beer Pong. Et Dieu vit que cela était bon. Très bon, même. Pour tout étudiant qui se respecte, le Beer Pong fait partie des passages obligés, de l’UV que chacun doit passer pour valider son semestre. Le principe de ce jeu aussi futile que divertissant, consiste à envoyer une innocente balle de ping-pong dans une série de gobelets lestés de bière. A un moment ou un autre de la partie, la bière finit par être bue et remplacée par de la vodka, du whisky ou, dans les cas les plus extrêmes, par de l’eau (la folie estudiantine n’a pas de limites).

A chaque fois qu’un gobelet est atteint, hop, il est retiré du jeu, jusqu’à ce qu’une équipe n’en ait plus. Le Beer Pong est donc aussi salissant (les gobelets, ça se renverse) que réjouissant (après avoir bu une partie du matériel de jeu), ce qui ne permet pas trop de le rendre jouable avec des enfants.

Mais ça, c’était avant.

Coup de gong pour Medieval Pong

Réjouissez-vous, les amis ! Car voici venir le Medieval Pong, l’une des stars du Festival des jeux de Cannes 2019. Vous pourrez donc ressortir votre skill passé et apprendre à vos marmots l’art du lancer sans risquer le coma éthylique. Joie !

Si le Beer Pong s’est racheté une conduite, n’allez pas imaginer qu’il n’intéressera que les enfants loiiiiiiiiiiiiiiinnnnnnnnnnnnnn de là ! Tous les jeux d’adresse constituent un challenge permanent pour les grands, curieux de savoir si « they still got it », ou pas. En général, ils en sont pour leurs frais… Mais allez savoir 😊

Medieval Pong est donc l’archétype du jeu familial. On le sort pour les enfants, et 10 minutes plus tard, ce sont les grands qui y jouent.

On ouvre le pont-levis !

Dans Medieval Pong, point de gobelets mais… des tours de château-fort ! Label « Medieval » oblige. Chaque équipe dispose en effet de 9 tours de château en plastique (solide). Plus stables que des gobelets, elles permettent de jouer sans passer sa vie à éponger la table.

Mais si la bière a disparu de l’équation, cela ne signifie pas pour autant que les tours du Château seront vides, loiiiiiiin de là.

Vous trouverez en effet dans Medieval Pong une jolie flopée de jetons, qu’il faudra sélectionner puis insérer dans les tours dans le plus grand secret. Et le truc qu’on aime déjà, c’est que certains jetons ne sont pas accessibles dès votre première partie ! Il faudra faire preuve de talent et d’adresse pour les mériter. Chouette idée, vraiment.

Si le jeu est simplissime, la règle n’est hélas pas super bien foutue, format « dépliable-un-peu-gonflant-et-écrit-petit ». Rien de grave, mais un tel jeu aurait pu bénéficier d’un livret un peu plus travaillé et d’une aide de jeu cartonnée. On apprécie tout de même le contenu, qui se fait fort de proposer diverses configurations de jetons pour des parties axées sur le défensif ou le spectaculaire, mais cela aurait pu se permettre un peu plus de flamboyance.

Les illustrations de Pauline Détraz sont fort jolies, et les jetons en carton sont plus mignons les uns que les autres. Et là, vous allez me demander : « Euh… en quoi est-il plus intéressant d’utiliser des jetons en carton que de la bonne bière qui mousse ? ».

C’est une excellente question, je vous réponds de suite.

Trouvez la couronne !

Pour gagner à Medieval Pong, il faut vaincre l’ennemi en lui dérobant sa couronne, cachée dans votre château composé d’un carré de 3×3 tours renversées. Au cours de la mise en place, vous aurez pris soin de déposer deux couronnes dans deux de vos tours, bien évidemment dans le plus grand secret. Après avoir déposé les couronnes, vous déposerez également un jeton Roi et un jeton Princesse dans ces mêmes tours. Ce seront les cibles prioritaires à abattre, même si vous et votre adversaire ignorez bien évidemment où chacun les a dissimulées.

Et dans les 7 autres tours, allez-vous me dire ? Eh bien c’est là que le jeu devient génial : vous mettez 7 jetons, chacun déclenchant un effet différent s’il est touché.

Eh oui, parce qu’un château, c’est peuplé ! Et surprenant !

Lors de la mise en place, donc, vous créez votre château de 9 tours que vous accolez à la boîte du jeu pour lui donner un peu plus de stabilité. Et dans chaque tour, hop, un jeton-personnage, prêt à déclencher une nouvelle guerre de cent ans à lui tout seul s’il est touché.

Une fois que chaque équipe a bâti « son » château, en bout de table, la partie peut commencer.

Quoi ? Une hirondelle portant une noix de coco ?

Le but de Medieval Pong consiste donc à placer adroitement sa balle de Ping-Pong dans une tour adverse qui contient l’une des couronnes, une fois qu’elle sera débarrassée du Roi ou de la Reine qui la protège. Le jeu se joue en tour par tour, chaque équipe ayant droit à un tir avant que l’autre puisse jouer ensuite. La première équipe qui y parvient remporte immédiatement la victoire.

Pour accomplir un tel exploit, il faut expédier sa balle dans le camp de l’adversaire, soit en tir direct en cloche, soit après un rebond. Ouais, comme ça, à l’ancienne, en visant au petit bonheur la chance et en se demandant où peut se planquer la couronne ennemie.

Si la balle loupe la cible, tombe de la table ou fracasse une coupe en cristal imprudemment laissée en arrière-plan, la balle revient à l’adversaire. Mais si elle tombe dans une tour, bim, on révèle le jeton qu’elle contient et on applique l’effet correspondant.

Et là, clairement, on tombe dans le génial.

Ah mon bô château Ma tant’ tire lire lo

Eh oui, à chaque fois que vous parvenez à lancer la balle dans une tour, votre adversaire doit vous révéler qui était son occupant en défaussant le jeton contenu, et (dans la plupart des cas), en virant la tour concernée.  Dès que le jeton est révélé, son pouvoir est aussitôt appliqué.

Voici quelques exemples de personnages et leurs effets correspondants.

  • La Princesse, commençons par elle, déclenche une phase de jeu « feu à volonté », dans laquelle les deux équipes tirent simultanément et non-stop jusqu’à ce que l’une des deux parvienne à atteindre une tour.
  • Le Roi, quant à lui, permet d’inverser (sous la table) deux tours de son château, histoire de brouiller les pistes.
  • Le Forgeron vous fabrique un boulet, et vous permet donc de lancer deux balles de ping pong, mais avec une seule main.
  • Le canon vous demande de balancer votre balle de ping-pong en utilisant une tour comme support.
  • L’architecte récupère une tour détruite et la place à l’envers sur l’une des autres, pour la protéger.
  • Le fantôme vous impose de jouer en… soufflant sur la balle, posée à plat sur votre main.
  • Le ninja vous permet de renvoyer une balle en approche… et de toucher directement votre adversaire.
  • Le dragon s’énerve et peut se retourner contre son propriétaire, etc.

Vous l’aurez compris, la variété est de mise et chaque personnage amène son petit effet boost qui génère surprise et fun à chaque coup au but.

Achievements Unlocked

Si le jeu commence assez logiquement avec 9 personnages (il y a 9 tours, pour rappel), vous pourrez ensuite en débloquer 6 autres au fur et à mesure de vos parties, pour un total de 15. Eh oui, les joueurs ne peuvent avoir accès à l’équipe complète qu’après avoir maîtrisé le jeu, ce qui est toujours utile pour assimiler les pouvoirs petit à petit.

Si on apprécie bien évidemment la possibilité de débloquer de nouveaux personnages au fil des parties, cela permet surtout de personnaliser son château au moment de la construction. Vous pourrez en effet sélectionner des effets plutôt offensifs ou défensifs en fonction de vos envies du moment. Il y a donc une vraie part tactique dans la création de son château, et c’est alors que le jeu prend son second souffle pour s’imposer comme étant un must-have de toute ludothèque familiale.

Oui, rien de moins.

Sensations de jeu

Fun à outrance, Medieval Pong génère donc des sensations de jeu galvanisantes. Il faut dire que beaucoup d’éléments sont réunis : dextérité, stratégie, chance et contexte fantasy pour que le plaisir de jeu soit optimal, aussi bien chez les petits marmots que chez les plus grands.

On se régale à improviser des tactiques de lancers, à expérimenter des stratégies d’attaque… et à se faire prendre sa couronne en deux tours à cause d’un adversaire très chanceux.

Jouant la carte du plaisir immédiat et décalé, Medieval Pong séduit rapidement tous les marmots de passage, bien avant l’âge indiqué de 8 ans. Rien n’empêche donc d’équilibrer les parties en réduisant le nombre de tours de château des plus grands, ou de rajouter des jetons dans celles des petits. Cela fonctionne très bien.

Tout est parfait, alors ?

Bah non, évidemment ! Si Medieval Pong est incontestablement une réussite, on pourra relever deux points négatifs. Le premier tient dans la stabilité des tours. Il est en effet très facile, en cas de tir direct, de les dégommer sans faire pour autant rentrer la balle à l’intérieur. Il faut dire qu’elles ne sont pas lestées par la bière, ce qui les rend fatalement plus légères.

Envisager des tours un chouïa plus lourdes aurait donc été une bonne idée, pour éviter de passer son temps à redresser les édifices renversés. Du côté de Plateau Marmots, on a résolu le truc en mettant un peu de Patafix sous chaque Tour, histoire de stabiliser l’ensemble.

Mais bizarrement mon plus gros grief est cosmétique… Je veux dire : nous avons clairement là un grand jeu, mais on a l’impression que Ravensburger a décidé de jouer la prudence et de ne pas entrer à fond dans le concept.

Un exemple tout bête : les Tours sont maintenues en place par les moitiés de la boîte de jeu. Bon, c’est sympa, mais aurait-il été difficile de faire des boîtes de jeux entièrement décorées façon château fort, tous les éléments d’info et de logo placés sur un fourreau ?

Aurait-il été difficile d’avoir des balles de ping-pong un peu décorées, voire tout bêtement grises ou noires, pour entrer dans le thème du boulet de canon ? Aurait-il été impossible d’avoir des jetons en plastique plutôt qu’en carton, voire des figurines, permettant du coup de jouer réellement avec un liquide, comme le jeu original ?

Bref, un peu plus de décorum n’aurait pas été superflu, histoire de pousser le délire jusqu’au bout.

L’avis de Plateau Marmots

Qu’on se le dise : Medieval Pong est un excellent jeu, qui saura vous enivrer éclater de longues heures durant. Si les premières impressions se limitent à celles d’un petit jeu d’anniversaire sympatoche et distrayant, il révèle assez vite son plein potentiel lorsque tous les personnages sont débloqués, permettant de se créer un château très différent de celui de l’adversaire. Que l’on joue en duo ou en équipe, on s’amuse énormément à tenter de trouver la couronne au milieu du château ennemi, et on enchaîne volontiers les parties tant le jeu est rapide à mettre en place et à jouer. Simple, efficace et bien plus stratégique qu’on ne le pense, Medieval Pong est une très jolie réussite, un jeu que l’on souhaiterait voir arriver assez vite dans une édition collector digne de ce nom, afin de maximiser encore le plaisir de jeu.

Le trouver

Chez Philibert

Fiche technique

Un jeu de Didier Lenain-Bragard et Jonathan Favre-Godal
Illustré par Pauline Détraz
Édité par Ravensburger
Pour 2 joueurs (mais jouable en équipe)
A partir de 8 ans, mais en vrai longtemps avant

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